En ces journées d’intense travail pour les Bleus à Capbreton, voilà au moins une peine que Fabien Galthié peut s’épargner. À quelques jours du coup d’envoi du Six-Nations, il n’a pas besoin de chausser ses désormais célèbres lunettes à larges montures pour réaliser que les compteurs de temps de jeu de ses internationaux ont déjà défilé à vitesse grand V. Ce constat relève de la plus stricte évidence.
17 feuilles de match pour Grégory Alldritt et Anthony Jelonch, 16 pour Antoine Dupont et Yoram Moefana… La mi-saison tout juste passée, ces petites piles…
17 feuilles de match pour Grégory Alldritt et Anthony Jelonch, 16 pour Antoine Dupont et Yoram Moefana… La mi-saison tout juste passée, ces petites piles culminent déjà à des altitudes élevées sous l’œil inquiet du sélectionneur. Et on vous épargne la conversion en minutes…
Une règle en la matière existe pourtant, Fabien Galthié l’a rappelée dans un entretien accordé à « Midi Olympique » : « Un joueur entre 19 et 24 ans, s’il souhaite exister au niveau international, ne doit pas excéder les 30 matchs par saison ; un joueur entre 24 et 29 ans, s’il souhaite être bon au niveau international, ne doit pas dépasser les 25 ; et un joueur entre 29 et 34 ans souhaitant perdurer au plus haut niveau ne doit pas aller au-delà de 20. C’est la règle et tout le monde la connaît. »
À un peu moins de huit mois de la Coupe du monde (8 septembre – 28 octobre), et alors que les Irlandais et les Néo-Zélandais sont gérés à la carte par leurs fédérations respectives, ses principaux cadres sont bien partis pour crever ce très théorique plafond de verre. Un diagnostic qui équivaut à l’illumination d’un clignotant orange sur le tableau de bord des Bleus quand on rappelle que la préparation pour le Mondial débutera une semaine seulement après la finale d’un Top 14 toujours plus éprouvant.
Oh bien sûr, c’est un sujet récurrent dans le rugby français. L’accumulation des blessures (1) avant le début du Tournoi l’a toutefois rendu particulièrement prégnant.
C’est une évidence également, Fabien Galthié n’a pas attendu le mois de février pour prendre la mesure de la problématique. Dès l’été dernier, des discussions avaient été menées entre les représentants de la FFR et de la LNR pour tenter d’encadrer le temps de jeu des internationaux. Mais cette initiative s’apparentant à la création d’une usine à gaz, les deux parties se sont séparées sur la promesse d’une gestion en bonne intelligence. « Il faut faire avec, c’est ce qu’on fait depuis trois ans, a observé Fabien Galthié au début du mois à Belvès. On fonctionne plutôt sur des régulations subjectives. »
Si le sélectionneur adopte un ton mesuré, c’est que les clubs, employeurs des internationaux s’il faut véritablement le rappeler, jouent globalement le jeu. « On a reposé quasiment tous nos internationaux qui n’étaient pas blessés, et on continuera à le faire, quitte parfois à prendre 30 points à La Rochelle », a ainsi souligné, il y a quelques semaines, Ugo Mola, manager du Stade Toulousain, le plus gros pourvoyeur des Bleus.
Mais en dépit de cette déclaration pleine de bonne volonté, cela ne l’a pas empêché d’émettre dans la foulée une petite nuance : « Nos internationaux ont surtout besoin de jouer des matches de haut niveau, que ce soit en club ou en sélection. C’est plus la régulation de nos compétitions qui pose débat. Les joueurs ont aussi des capitaux physiques différents. »
Manager de la performance des Bleus, Thibault Giroud souscrit à l’assertion : « L’individualisation est prédominante dans l’analyse de la performance des mecs. […] Les blessures récentes sont d’ailleurs plus le résultat de faits de match : que ce soit la main pétée de Cameron Woki ou les genoux de « Jo » Danty et Pierre Bourgarit. Notre sport va de plus en plus vite, les accumulations de minutes sont à prendre en compte. Mais c’est comme ça, le modèle français est ainsi fait. »
Malgré cette observation, Thibault Giroud ne minimise pas l’impact de la réalité de l’écosystème du rugby français : « C’est pour ça que je dis qu’il est important que la Coupe du monde arrive vite. Maintenir des intensités de très haut niveau pendant dix mois de l’année, ce n’est pas possible : il y a forcément des oscillations de forme ou des blessures. »
Il ne faudrait pas que le point bas de cette courbe survienne dans un peu moins de huit mois…
(1) Cameron Woki, Jonathan Danty, Maxime Lucu, Peato Mauvaka, Jean-Baptiste Gros, Pierre Bourgarit, Arthur Vincent.

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