En 2021, la part de retransmission de sport féminin dans les retransmissions sportives diffusées sur nos écrans était de 4,8%. C’est le chiffre révélé par un rapport de l’Arcom présenté à la veille de l’opération Sport Féminin Toujours.
Malgré quelques évolutions, le sport reste un grand bastion de sexisme et cette étude de l’Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) vient le prouver une fois de plus. 4,8% des retransmissions sportives seulement sont consacrées au sport féminin ! Le rapport note une hausse « encourageante » (!) par rapport à 2018. Cette proportion n’était alors que de 3,6%. Le volume horaire de sport masculin est seize fois plus élevé que celui du sport féminin compte le rapport.
Difficile d’applaudir une si faible progression déplore Beatrice Barbusse, sociologue du sport engagée pour la féminisation du sport. Comme le disait Agnes Jaoui à propos de la place des femmes au cinéma, il est temps d’arrêter de « se réjouir de chiffres aussi minables » (Lire ici).
Même quand on entre dans le détail des chiffres et des interprétations, il n’y a pas de quoi se réjouir. Ces chiffres reflètent difficilement la situation précise puisque sur les quatre années sur lesquelles porte l’étude, chacune revêtait un événement ou contexte particulier. En 2018, les Jeux Olympiques et Paralympiques d’hiver puis ceux d’été en 2021. En 2019, la Coupe du monde féminine de football en France et en 2020, la crise sanitaire avec le Covid. Les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) permettent généralement une belle mise en avant des sportives « les chaînes qui les diffusent jouant généralement le jeu de la mixité ».
Et c’est pour cette raison que l’Arcom ne s’est pas contentée d’analyser seulement la part de sport féminin et la part de sport masculin. Si elle a choisi d’inclure également une catégorie mixte c’est parce que celle-ci « recouvre les compétitions comme les Jeux Olympiques, Roland-Garros ou les Championnats du monde d’athlétisme, pour lesquelles il apparaît difficile d’isoler le volume horaire dédié spécifiquement à la pratique féminine ou masculine du fait de l’enchaînement rapide – voire de la superposition – des épreuves diffusées par les chaînes.»
Un autre point qui a dû être pris en compte pour cette étude est celui du mode de diffusion puisque « 97 % du volume horaire total des retransmissions sportives est porté par les chaînes payantes ». Trois catégories ont donc ainsi été définies : les chaînes gratuites généralistes, la chaîne l’Équipe et les chaînes payantes à thématique sportive.
Sur les chaînes gratuites, on constate qu’en 2018 la part de diffusion mixte est la plus importante et s’explique par la tenue des JOP. En 2019, celle-ci baisse mais la part de retransmission de sport féminin augmente grâce à la tenue de la Coupe du monde féminine de football en France. Si en 2020, la crise sanitaire a touché tout le monde… Curieusement le taux de sport féminin chute drastiquement tandis que la part de retransmission de sport masculin augmente. « Le volume horaire du « sport féminin » baisse très fortement pour atteindre 51 heures (-70 % par rapport à 2019, -40 % par rapport à 2018). Cette baisse est disproportionnée par rapport à celle connue par le « sport masculin » avec -33 %. »
France Télévisions est le principal diffuseur de sport féminin sur les chaînes gratuites françaises avec 48% de diffusion. En majorité, « les groupes audiovisuels [ont tendance] à diffuser des événements sportifs féminins à forts enjeux sur les chaînes historiques et les événements de moindre attractivité sur les chaînes gratuites secondaires des groupes (France 4, TMC, W9, C8, CStar) ».
Quant aux disciplines sportives féminines les plus diffusées sur des chaînes gratuites, le rapport indique que le football arrive en première place avec 44 % du total sport féminin, suivi par le tennis (13 %), le rugby (16 %), le cyclisme (11 %), le handball (6 %) et le ski (6 %).
Les retransmissions sur chaînes payantes sont très importantes par rapport à celles diffusées sur les chaînes gratuites puisque « 97% du volume horaire total des retransmissions sportives est porté par les chaînes payantes ». Et c’est justement sur ces chaînes-là que le sport féminin est le moins retransmis.
Entre 2018 et 2021, la différence est d’ailleurs flagrante car si sur les chaînes gratuites, la part de sport féminin oscille entre 5,5% et 17,5%, elle se situe entre 3% et 6% sur les chaînes payantes ! La chaîne L’Équipe joue quant à elle les intermédiaires avec un taux de retransmission de sport féminin entre 7% et 10%.
Afin d’inciter les médias à proposer et diffuser davantage de retransmissions sportives sur leurs antennes, l’Arcom, en partenariat avec le ministère des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, et le soutien du ministère chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances, du Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF) et du Comité Paralympique et Sport Français (CPSF), reconduit cette année encore l’opération Sport Féminin Toujours. Celle-ci avait vu le jour pour la première fois en 2014 à la suite d’une étude du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) qui mettait en évidence un taux bien trop faible de retransmission de sport féminin. Cette année, l’opération se tiendra du lundi 30 janvier au dimanche 5 février 2023 avec pour thématique « Le sport comme remède » et sera marrainée par la handballeuse internationale Cléopâtre Darleux.
Pendant une semaine, tous les médias participant à l’opération Sport Féminin Toujours (chaînes de télévision, radio, presse écrite et numérique) s’engagent notamment à « mettre en valeur le parcours de femmes dont la pratique sportive, professionnelle ou amatrice, a joué un rôle majeur dans la guérison, la reconstruction ou l’émancipation », comme l’indique le dossier de presse publié ce jeudi 26 janvier, à l’occasion de la conférence de lancement de l’opération.
L’opération a d’ores et déjà commencé sur les réseaux sociaux avec l’invitation de l’Arcom à mettre en avant les sportives/expertes qui donnent envie chaque jour de voir plus de sport au féminin, à l’antenne et dans les instances dirigeantes.
A la vue des résultats toujours aussi faibles diffusés dans le rapport de l’Arcom, cette semaine de mise en avant du sport féminin est évidemment une belle vitrine et un bon moyen de le médiatiser. Cependant, il est important que cela perdure afin de ne pas se contenter d’un si faible taux de représentation de sport féminin qui, malgré une augmentation significative depuis plusieurs années, reste encore bien trop insuffisant.
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