Pour la blague, dès qu’il a su que le point presse serait pour lui, Ilikena Bolakoro, surnommé « Bola », avait fait croire qu’il serait d’avance malade. Pas qu’il déteste ça, mais parler de soi dans une langue qui n’est pas la sienne n’est jamais un exercice facile.
Avec humour, aisance et dans un français finalement très bien maîtrisé car appris sur le tas dès son arrivée en France, à 19 ans, le centre fidjien de 34 ans s’est livré sur ces sept longs mois dacquois sans jouer, jusqu’à une sorte de délivrance physique et psychologique dimanche dernier, face…
Pour la blague, dès qu’il a su que le point presse serait pour lui, Ilikena Bolakoro, surnommé « Bola », avait fait croire qu’il serait d’avance malade. Pas qu’il déteste ça, mais parler de soi dans une langue qui n’est pas la sienne n’est jamais un exercice facile.
Avec humour, aisance et dans un français finalement très bien maîtrisé car appris sur le tas dès son arrivée en France, à 19 ans, le centre fidjien de 34 ans s’est livré sur ces sept longs mois dacquois sans jouer, jusqu’à une sorte de délivrance physique et psychologique dimanche dernier, face à Suresnes, où il était enfin sur le pré (victoire 49-21). Il le sera de nouveau, ce samedi 22 janvier, chez le 5e, Valence-Romans (19 heures).
Il paraît que vous vouliez vous porter pâle pour cette interview… Alors qu’à Biarritz, votre premier club à votre arrivée en France, en 2007, vous étiez surnommé « le Français » ! Pourquoi ?
Je ne peux pas le dire, c’est un secret (rire) ! C’est surtout qu’il faut faire l’effort de la langue, surtout en France. Si tu ne parles pas français, personne ne fera l’effort de parler avec toi, ce qui est normal. Quand tu arrives dans un autre pays, il faut essayer. Même si le français est difficile.
Au début je ne comprenais rien du tout, puis il y a eu les cours et entendre la langue tous les jours à l’entraînement, en match, ça aide beaucoup aussi. L’apprentissage dure longtemps quand même, j’ai bien mis cinq ans pour bien comprendre. Mais je pense que ça m’a aussi servi dans ma carrière: les coachs, les joueurs voient que tu fais l’effort, ça aide pour l’intégration, pour s’entendre avec les mecs sur le terrain, partout.
Maintenant que vous êtes là, que vous avez joué ce premier match de votre saison, comment ça va ?
Ah ! Je suis très, très content. Il a juste fallu passer le stress des premières minutes parce que la dernière fois (lors de la réception de Nice, le 4 décembre 2021, NDLR), j’étais sur le banc mais je n’ai même pas fini l’échauffement. Je ne me sentais pas bien, je suis rentré à la maison et quelques jours après, j’avais le Covid. Cet épisode a été dur, surtout que j’étais déjà arrivé avec cette blessure à la cuisse…
Comment avez-vous géré cette indisponibilité ?
Mentalement ça a été très difficile. Quand tu vois les autres et ton équipe jouer, tu as envie de donner quelque chose au groupe. Heureusement que j’avais ma famille pour relativiser même si ma femme a dû faire avec mon impatience et ma frustration ! Elle m’aide beaucoup, notamment parce qu’elle est hypnothérapeute. Je n’y croyais pas trop mais comme la situation était difficile, que je me posais beaucoup de questions, jusqu’à me demander si je pouvais encore jouer, j’ai essayé !
Et alors ?
Ça m’a beaucoup relâché ! Notamment avant le match de Suresnes. Au début, je me suis dit qu’il fallait peut-être essayer une semaine avant le match, si jamais ça m’endormait… (rire) Mais on n’a pas réussi parce que je ne faisais que rigoler ! Au début de la semaine du match, je me suis dit qu’il fallait le faire sérieusement, on a fait une séance et ça a très bien marché. J’ai eu des bonnes sensations et il le fallait parce que c’était ma chance. J’étais arrivé blessé et après sept mois, c’était important que ça se passe bien.
Comment votre arrivée à Dax s’est-elle déroulée ?
Il y a an, quand j’ai su que je devais me faire opérer de l’épaule, Nevers m’avait aussi dit qu’il ne me gardait pas. Mais c’est comme ça, c’est la vie. J’étais surtout content que le coach soit clair, comme ça, j’ai pu me concentrer sur cette opération et me projeter sur la suite.
J’ai alors dit à mon agent que j’aimerais revenir dans le Sud, pour moi, ma femme et mes deux garçons. Il a pris contact avec Benoît qui ne savait pas trop, ce qui est normal vu que j’allais être opéré de l’épaule, donc on a attendu. Puis il a vu mon dernier match à domicile avec Nevers, et il m’a dit, « c’est ok viens » !
Comment avez-vous trouvé le groupe dacquois ?
Le groupe est très bien, il y a de la jeunesse et de l’expérience, il faut juste régler les petites erreurs mais on est là. Il faut être sûr de nous et avoir confiance. Ce qui est rassurant pour l’instant, c’est qu’on joue, on n’est pas bloqués malgré les défaites, on joue.
Dimanche, j’étais aussi content pour les trois-quarts, ça faisait longtemps qu’on n’avait pas joué comme ça. On était beaucoup dépendants des avants qui sont forts depuis le début, nous, ça a mis plus de temps avec les blessures, le Covid… Mais maintenant je croise les doigts pour 2022 et j’espère faire une belle fin de carrière en remontant avec ce groupe qui mérite.
Si vous prenez du recul sur votre parcours, qu’est-ce que vous diriez au jeune de 19 ans venu en France ?
(Il réfléchit) Les deux semaines après mon arrivée étaient très dures, j’étais dans la famille de Sireli Bobo mais je ne voulais rien montrer, alors quand je me retrouvais seul dans ma chambre, je pleurais. Aujourd’hui j’en rigole mais je lui dirais peut-être que ça va aller et qu’il sera content d’avoir fait l’effort de cette langue, même si je me trompe des fois en français, je suis un peu fier.
La rencontre sera retransmise sur la plateforme sportall.tv