Après deux matchs, on a déjà beaucoup vu la paire Grégory Alldritt – Yoan Tanga. Au point que si certains s’interrogeaient sur le choix de l’ancien Racingman de se confronter à la concurrence du n° 8 des Bleus, leur complémentarité peut au contraire plaider en faveur de leur association au niveau international. À La Rochelle, s’ils brillent, Rémi Bourdeau (30 ans, 1,94 m, 108 kg), le dernier larron de la 3e ligne n’y est pas pour rien.
« C’est la constance, il ne passe jamais à travers, opine Romain Carmignani…
« C’est la constance, il ne passe jamais à travers, opine Romain Carmignani, l’un des entraîneurs des avants. Il a la capacité d’enchaîner les tâches obscures, il aime travailler, est irréprochable dans sa vie extra-sportive et à l’Apivia Parc. Toujours de bonne humeur, de bon conseil, c’est le partenaire idéal. Je pense qu’il soulage beaucoup « Greg » et Yoan. » Il y a quelques saisons, l’ancien Racingman et Biterrois n’aurait pas forcément goûté ce rôle. Recruté en 2018, il avait marqué les esprits par son activité offensive et défensive. Sa blessure au genou en novembre de la même année puis quinze mois de convalescence ont changé la donne et son regard sur sa place.
« Autant si je ne m’étais pas blessé, j’aurais peut-être aimé être un joueur mis en avant, autant il a même été question de ne plus pouvoir jouer… Quand je suis arrivé, je voulais montrer à tout le monde que je pouvais tout péter alors que quand on est installé dans le groupe, on est plus au service de l’équipe. Maintenant, je suis un soldat, convenait le Rochelais en avril. Pour être au top, il faut enchaîner, ce n’est pas toujours le cas. J’ai un peu perdu en termes de vitesse pure et d’explosivité, peut-être que c’est dû à l’âge, à la longueur de la blessure et à ses séquelles. Mais j’essaie de travailler ma régularité, j’ai fait des bons matchs et d’autres où j’ai fait le boulot, mais pas plus. »
En cette fin d’été, son efficacité défensive (18 plaquages réussis, aucun manqué), en touche et dans les rucks valide ses efforts et flatte peut-être son ego : « Il faut en avoir évidemment – ainsi que de la confiance en soi. Mais il faut aussi savoir le mettre de côté quand tu es sur la touche ou hors groupe. Et puis, il faut savoir laisser faire quelqu’un qui est plus réputé dans une tâche. Même si j’adore porter les ballons, quand il y a un Uini (Atonio) devant… »
Dans « un super groupe », le pilier droit fait partie des « stars qui n’ont pas le melon » mais qu’il faut suppléer lors de doublons qui nécessitent « des jeunes enthousiastes et des « joueurs club » expérimentés ». Deux catégories également capitales le reste du temps : « Si tu n’as que des stars, il n’y a que des joueurs qui veulent « gameller » ; il faut des soldats à côté sans qui l’équipe avancerait peut-être moins. »
Bien sûr, lui aussi aimerait jouer plus, conscient que l’arrêt de Kévin Gourdon puis la blessure de Victor Vito ont favorisé son temps de jeu la saison dernière. Mais pas question de se plaindre. D’autant qu’il était des « décideurs », les remplaçants qui ont fait basculer la finale européenne, face au Leinster, en mai. « Ma famille était de mariage le week-end de Marseille, et comme je sentais que j’allais encore être 24e, je lui avais dit de ne pas venir. Victor se blesse, je joue, en plus assez longtemps pour un remplaçant, je vis la fin de match et on gagne. J’étais un peu déçu qu’il n’y ait personne (sourire). C’est du plus, je ne m’y attendais pas », confie celui qui ne se serait « pas senti champion » s’il n’avait pas été dans le groupe.
Aujourd’hui champion et trentenaire, Rémi Bourdeau, l’anti-ego du Stade Rochelais, sent aussi qu’il fait partie des « papas », désormais. « Oui, apparemment (sourire). C’est un rôle que j’aime bien. Même si ça me ferait chier de voir les jeunes jouer et pas moi en début de saison, nous disait-il en août. Mais je ne leur mettrai jamais des bâtons dans les roues, au contraire, je ferai tout pour qu’ils soient dans de bonnes conditions. Plus jeune, je n’étais peut-être pas là-dedans… Dans ce championnat, un des meilleurs au monde, chacun veut décrocher son contrat, un meilleur salaire. Ça entre en ligne de compte. Mais je n’ai pas envie de laisser l’image d’un mec qui va ignorer les autres 3e ligne. »
Au contraire, il est proche de redoutables concurrents : Wiaan Liebenberg, retraité cet été, et Matthias Haddad-Victor, pépite de 21 ans. Blessé, celui-ci semble promis à accompagner Alldritt et Tanga à son retour. « Je déteste les individualistes, j’en ai rencontré quelques-uns dans ma carrière, assez peu, je ne peux pas, tranche Bourdeau. Des mecs qui ne pensent qu’à eux, à faire leurs feuilles de match, qui balancent un petit mot dans le vestiaire dès qu’il y a une caméra… Ce qui prime, c’est de faire passer l’intérêt collectif en premier. Matthias, même s’il est jeune et a envie de tout casser, le sait », complimente son aîné. Qui ne lui déroulera pas pour autant le tapis rouge cet automne.

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