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Le directeur de la performance du XV de France fait le point sur l'état physique des joueurs prétendants au Tournoi des 6 nations. Il détaille aussi sa méthode de travail, qui doit beaucoup selon lui aux échanges qu'il peut avoir avec les staffs du Top 14. Il explique enfin pourquoi, après le Mondial, il quittera le giron fédéral pour s'engager avec Bordeaux. 
On déplore beaucoup de blessés et d'incertains chez les prétendants au groupe des 42. Comment jugez-vous le niveau physique global des troupes ?
Nous avons mis en place un système en corrélation avec les clubs. Cela nous permet de suivre au quotidien nos joueurs et même l’ensemble des joueurs du Top 14 et de Pro D2. On voit qu’il y a beaucoup de bienveillance de la part des clubs qui, malgré leurs impératifs et leur besoin de résultats, jouent le jeu avec nous. Il y a pas mal d’échanges donc nous avons une très bonne vision d’ensemble. Sur les blessés, nous savons que nous allons perdre des joueurs pour le Tournoi. Idem pour la Coupe du monde : nous allons partir avec des joueurs pour la préparation et la terminer avec d’autres. Cela fait partie des impondérables du rugby de haut niveau.
Danty et Mauvaka sont forfaits, Atonio incertain, Jalibert et Penaud ont des soucis musculaires, Cros et Villière sont en phase de reprise. On parle de joueurs cadres…
Il n’y a pas plus de blessés que les saisons passées. Depuis quatre ans, nous avons aussi vu pas mal de joueurs. Le fait de pouvoir travailler au quotidien à 42 nous a permis de voir grandir le réservoir des prétendants. Nous avons de la réserve. Dans un monde idéal, on aimerait partir avec nos joueurs « premiums » à chaque fois, mais c’est impossible. Nous ne sommes pas plus inquiets que cela.
Savez-vous dans quel état de forme vous allez retrouver les joueurs dimanche prochain ?
On le sait très exactement et pour chaque joueur. On a travaillé en amont avec eux et leur club. Chaque prétendant au XV de France, c’est-à-dire un groupe d’une soixantaine de joueurs identifiés, a en sa possession les objectifs de données physiologiques que l’on souhaite qu’il atteigne à la séance, à la journée ou à la semaine. Avec les staffs des clubs, on peut ainsi réguler leur charge de travail et leurs attendus. Nous ne sommes plus dans le ressenti. Avec les données échangées, nous savons à l’instant T où en sont les joueurs physiquement. Et nous pouvons leur donner des recommandations, réguler leur temps de jeu en discutant avec leur staff. On doit remercier les clubs qui sont vraiment à notre écoute. Ce partage de données est très précieux, il nous a changé la vie. Dorénavant, on ne repart pas de zéro à chaque rassemblement. Du coup, dans notre période de travail, on peut se concentrer sur notre rugby, notre stratégie. Le travail physiologique et l’entretien peuvent être intégrés dans nos séances de rugby.
Ces éléments chiffrés interviennent-ils dans la sélection ?
Les qualités rugbystiques restent prépondérantes mais dans les réunions du staff, chaque mardi, j’interviens à leur demande pour les informer si tel ou tel joueur remplit les objectifs. C’est une donnée « scientifique » dans un jugement qui est forcément humain. On a des attendus poste par poste qui sont les qualités physiologiques de base à avoir pour le niveau international. C’est une sorte de baromètre physique. Cela amène de la crédibilité à la sélection d’un joueur.
Pour le début du Tournoi, vous allez vous déplacer d’abord à Rome puis en Irlande. Fabien Galthié vous a-t-il fixé l’objectif d’avoir un groupe très performant physiquement pour cette première quinzaine ?
On sait que l’Irlande va être un très gros rendez-vous mais en tant que directeur de la performance, je ne peux pas dire à Fabien "on sera en forme face à l’Irlande mais moins bien pour l’Ecosse et sur les rotules à la fin du Tournoi". Il veut que, collectivement, on soit performant sur toute la durée de la compétition. L’objectif est d’être linéaire et de maintenir les joueurs au-dessus de 80% de leur potentiel maximum sur les cinq rencontres. Nous ne sommes pas dans l’athlétisme ou la natation, avec des joueurs moins bien à un moment donné. C’est l’intérêt de notre méthode et de nos échanges avec les clubs. J’insiste là-dessus mais c’est primordial. Cela nous permet d’être, toute l’année, informés sur leur état de forme. Et on peut leur demander, avec l’autorisation de leurs clubs, de travailler spécifiquement tel ou tel domaine si l’on perçoit une baisse ou une lacune.
Concrètement, si on prend l'exemple du pilier droit : vous imposez les mêmes attendus physiques à un Uini Atonio, au physique atypique et une grosse expérience, qu’aux autres prétendants, Demba Bamba, Mohamed Houas ou Dorian Aldegheri ?
Les objectifs sont les mêmes mais la réflexion du staff tient compte des qualités de chacun. On ne cherche pas des athlètes, plutôt à développer des points forts. Il n’est pas question de demander à Atonio de faire du large-large tout le match, des courses horizontales durant 80 minutes. Il est très explosif avec une grosse capacité d’accélération et c’est cela que l’on cherche à amplifier. Et il l’a fait. Depuis ses débuts, il a progressé dans ses capacités d’accélération. De même, on ne demande pas la même chose à Bamba ou Haouas, qui ont d’autres qualités.
Après avoir allégé la deuxième ligne avec l’installation de Cameron Woki et l’arrivée de Thibault Flament, vous enregistrez pour le Tournoi le retour de Paul Willemse, plus massif. Vous regardez aussi attentivement le Toulousain Emmanuel Meafou. Souhaitez-vous densifier à nouveau le cinq de devant ?
Quelles doivent être les qualités d’un joueur du cinq de devant ? Cumuler l’intensité courue avec celle combattue, c’est-à-dire se déplacer sur les zones d’affrontement et aller y batailler. Les deux noms que vous citez, Paul (Willemse) et Meafou, présentent de vraies appétences dans ce domaine. Regardez l’évolution dans son jeu de Paul Willemse, ou de Romain Taofifenua depuis 2019. Ils ont perdu quelques kilos superflus et sont beaucoup plus performants. On ne cherche pas la puissance ou le combat à tout prix. Je crois aussi qu’en deuxième ligne, tout est une question d’équilibre. Après pour Meafou, on le suit, mais pour le moment il n’est pas sélectionnable. Quand ce sera le cas, on verra s’il répond aux attendus du niveau international.
Fabien Galthié évoque la préparation du Tournoi des 6 Nations, les diverses blessures mais aussi les éventuelles surprises à attendre dans le groupe…

Pour en savoir plus c’est par ici : https://t.co/jvKqZHTHKe pic.twitter.com/5Rho86xsaR
Comment faire pour maintenir Antoine Dupont au top physiquement et, dans le même temps, le préserver d’une éventuelle blessure ce qui serait vécu comme une catastrophe ?
Sa suspension pour le match contre le Japon a été un mal pour un bien, car l’équipe de France a dû faire sans lui. C’est bien d’avoir plusieurs scénarios afin de tous les tester. Après, je vais être très honnête avec vous : si la Coupe du monde était dans deux ans, je vous dirais que je serai très inquiet pour Antoine. Arriver à maintenir ce niveau d’intensité… (il grimace) C’est bien que le Mondial soit dans huit mois. Mentalement et physiquement, jouer 2000 minutes par an à son niveau, tu ne peux pas le reproduire pendant dix ans.
N’est-on pas prêt trop tôt ? 2022 a été une année parfaite, mais il faut la reproduire en 2023…
Cela fait quatre ans que Fabien Galthié a mis en place un fonctionnement où le Graal doit être cette Coupe du monde. On bosse tous les jours en pensant à cela. On a fait évoluer toute notre méthodologie dans les entraînements, le management, en fonction de ce que l’on a vécu. On doit en être aux versions 7 ou 8 mais l’objectif final reste le même. Chaque année doit nous permettre de franchir un palier. Donc je ne pense pas que 2022 ait été l’année parfaite. Nous avons encore une marge de progression.
Pour terminer, pourquoi avez-vous choisi de vous engager avec l'UBB à l'issue de la saison ?
C'est une question de vision et de rencontre. D'abord, après deux Coupes du monde dont une qui va se dérouler à domicile, j'avais envie de me mettre en danger professionnellement, d'avoir un nouveau projet. Je me régale avec le XV de France mais dans ma tête, quand nous sommes arrivés en 2019 juste avant le Japon, l'idée était de gagner du temps pour les quatre prochaines années. J'avais aussi envie de retrouver le travail au quotidien avec un groupe. J'ai eu une première opportunité avec le Racing. Quand j'ai échangé avec Stuart Lacnaster, je me suis rendu compte que nous souhaitions aller dans deux directions opposées. C'est ici que la vision est importante. J'ai alors réfléchi à me tourner vers d'autres sports et c'est à ce moment que Yannick Bru m'a contacté. Yannick, je le connais depuis 2017, quand j'étais en poste à Glasgow. Depuis, on échange régulièrement. L'envie de travailler ensemble était présente, l'opportunité s'est présentée. J'espère que j'aurai la même osmose dans ma relation professionnelle que celle que j'ai avec Fabien Galthié. 
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