Un an. Enfin, presque. 12 juin 2021 : Steffon Armitage envoie Biarritz en Top 14 et l’Aviron Bayonnais en Pro D2 en transformant son tir au but de 22 mètres, face aux poteaux, au terme d’une rencontre irrespirable (6-6, 6-5 tab). 5 juin 2022 : Bayonne s’offre un nouveau titre de champion de France de Pro D2, à l’issue d’une finale maîtrisée de main de maître face à des Montois surclassés (49-20).
En l’espace d’un an, le club ciel et blanc est passé de l’enfer au paradis. Du traumatisme d’une relégation face au voisin et rival de toujours, au bonheur d’un retour dans l’élite du rugby français. Entre-temps, une longue saison dans l’antichambre. Très longue saison. Trente matches de poule, auxquels se sont ajoutés deux rencontres de phases finales. 283 jours entamés…
En l’espace d’un an, le club ciel et blanc est passé de l’enfer au paradis. Du traumatisme d’une relégation face au voisin et rival de toujours, au bonheur d’un retour dans l’élite du rugby français. Entre-temps, une longue saison dans l’antichambre. Très longue saison. Trente matches de poule, auxquels se sont ajoutés deux rencontres de phases finales. 283 jours entamés le 26 août 2021 par une victoire bonifiée contre Agen (37-16).
Une entame positive sur le plan comptable, comme le sera le premier bloc de ce championnat : quatre victoires et un match nul. Les Bayonnais performent mais il reste un goût d’inachevé. Un peu comme un élève à fort potentiel qui se contenterait du minimum, l’Aviron engrange mais ne séduit pas toujours. Ne perd pas mais ne convainc pas forcément. On attend plus du grand favori de la saison. Des succès avec la manière.
Celle-ci se fait jour sur la pelouse de Colomiers, lors de la 7e journée. Mais elle s’accompagne d’une défaite (27-26). La première. Bayonne est alors quatrième au classement, à quatre points du leader montois. Une surprenante formation landaise qui viendra l’humilier trois semaines plus tard, le 5 novembre, sur la pelouse de Jean-Dauger (14-33). Cette saison de Pro D2 ne sera pas une partie de plaisir.
Dans les coulisses, ce n’est vraiment pas l’entente cordiale. Le 7 novembre, « Sud-Ouest » révèle que Yannick Bru quittera le club à la fin de l’exercice. Peu importe l’issue. L’ancien entraîneur de l’équipe de France ne se reconnaît plus dans le projet porté par le président Philippe Tayeb. Le staff dans son ensemble ne se sent pas vraiment soutenu. Et comme si ça ne suffisait pas, le premier actionnaire met en cause le conseil d’administration. L’accusant de ne pas avoir respecté ses promesses. Allant même jusqu’à parler d’ « intérêts personnels frisant les délits d’abus de bien social. »
Dans ce contexte, joueurs et encadrement font corps. Ils se resserrent autour de l’objectif qu’ils se sont fixé en début de saison : terminer dans les deux premiers à l’issue de la phase de poule, synonyme de demi-finale à domicile. Le chemin le plus court et le moins ardu pour retrouver le Top 14. Ils y parviendront. Non sans mal.
Car le Stade Montois ne faiblit pas. Oyonnax est un sérieux client. À la 18e journée, le 21 janvier, au soir d’un revers à domicile contre Grenoble (35-37), l’Aviron, troisième, accuse six et neuf points de retard sur le duo de tête. Les Bayonnais sont inconstants, parfois énervants pour les supporteurs, mais eux, ne paniquent pas. Ils savent où ils veulent arriver. Ils ont une mission à accomplir et sont focalisés dessus. Dans un esprit de combat avoisinant le « seul contre tous », ils avancent.
En tête, Mont-de-Marsan confirme match après match qu’elle est la plus séduisante et efficace équipe du championnat. L’accès direct aux demi-finales vire donc au duel avec Oyonnax. Le 10 mars, Uzair Cassiem et ses coéquipiers frappent un grand coup en écrasant les Oyomen (52-21). Ils reprennent la deuxième place au classement, avec deux points d’avance sur les hommes de l’Ain (80 à 78). Mais il est écrit que cette saison ne sera pas un long fleuve tranquille. Alors, les supporteurs bayonnais tremblent jusqu’au bout.
Au soir de la défaite sur la pelouse de Carcassonne, le 5 mai, lors de l’avant-dernière journée (33-28), les barrages semblent plus que jamais d’actualité. Oyonnax reçoit le lendemain Aix-en-Provence et se voit offrir une occasion en or de reprendre la place de dauphin, alors qu’il n’a qu’un point de retard (95 contre 94) et un match de plus à disputer. Mais il échoue, battu 16-20. Joli coup de pouce du destin. Les hommes de Yannick Bru ne laisseront pas filer ce pain bénit. Lors de l’ultime joute, ils ne font qu’une bouchée de Rouen (53-13). Et s’offrent deux semaines de préparation avant de recevoir… Oyonnax, en demi-finale.
Le 26 mai, comme un résumé d’une saison chaotique, ils sont bousculés. Menés de huit points à une demi-heure de la fin (12-20). Mais Jean Monribot et ses amis ont la foi. Ils ont une mission à accomplir. Un travail à finir. Ils se le sont promis en début de saison. Ils se le sont rappelé lors d’un stage à Loudenvielle, fin mars. Rien ne peut leur barrer la route. Pas même les défections de dernière minute du capitaine Mariano Galarza et du centre Isaia Taoeva.
Portés par de percutants remplaçants, ils grignotent rapidement leur retard puis prennent les devants. Les Oyomen perdent le fil de la rencontre et leurs illusions avec (32-20). Bayonne est en finale. « Là où on voulait être », martèlent joueurs et encadrement.
Une semaine plus tard, à Montpellier, c’est un final de gala qui se profile. Le premier de la phase de poule contre son dauphin. La plus séduisante formation contre le grand favori du début de saison. Un acte III comme un parfum de revanche pour des Bayonnais qui ont encaissé deux défaites face aux Landais, mais surtout deux épisodes (Casa de papel et Peaky Blinders) qui leur restent encore en travers de la gorge.
Programmés pour ça, les joueurs de l’Aviron se révèlent rapidement maîtres de la situation. Germain régale par sa longueur de jeu au pied ; Baget confirme son statut de meilleur marqueur d’essais en plantant son 16e de la saison. 20-10 à la mi-temps : c’est peu cher payé. Mais ce n’est que le début. Face à des Montois dépassés, les hommes de Yannick Bru régalent leurs supporteurs. Ceux présents dans les travées du GLL Stadium comme ceux restés à Bayonne, installés sur le carreau des halles.
Les essais pleuvent. Le score est sans appel (49-20). Au coup de sifflet final, c’est une marée humaine qui envahit le terrain. Ivre de bonheur.
Le jeune Perchaud saute comme un cabri dans tous les sens ; le futur Dacquois Delonca jubile avec le drapeau catalan autour de la taille. Tous les deux sont en larmes. Heureux du travail accompli. Fiers d’avoir replacé l’Aviron sur la carte du Top 14. Lors de la remise du trophée, la communion est totale. Yannick Bru, qui avait finalement tout à perdre dans cette histoire, tant ce retour en Élite devait être une formalité pour beaucoup, savoure. Un peu à l’écart au début. Question de caractère. Histoire aussi d’en prendre sereinement conscience, avant d’être happé par la foule.
La soirée qui s’ensuit n’est que sourires, danses et échanges complices entre joueurs et staff. Le lendemain, au balcon de la mairie, est digne de l’ouverture des Fêtes de Bayonne. Des milliers de personnes se sont massées sur la place pour acclamer leurs héros et célébrer avec eux ce titre de champion de France et le retour en élite. À ce moment-là, tout est oublié : les victoires sans saveur, les défaites amères, les sifflets désapprobateurs.
L’Aviron Bayonnais a réussi son pari. C’est tout ce qui compte. Avec, cerise sur le gâteau, une finale de rêve. L’été sera joyeux dans la capitale du chocolat. La reprise, c’est une autre histoire. Ce sera au nouveau staff emmené par Grégory Patat de l’écrire. Mais chaque chose en son temps.