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Montpelliérain depuis treize ans, Benoît Paillaugue a surpris tout le monde en rejoignant la rade cet été. La rencontre face à "son" MHR sera forcément particulière. Et chargée en émotion.
Joueur de Montpellier pendant treize saisons (2009-2022), Benoît Paillaugue fait partie de ceux qui ont écrit l’histoire du MHR. Son départ pour Toulon, cet été, a donc été vécu comme un petit séisme dans le monde du rugby, puisque tout le monde imaginait que le demi de mêlée terminerait sa carrière dans l’Hérault. Mais, à 34 ans, le tout frais champion de France a donné un rebond inattendu à sa carrière. Et il ne le regrette pas.
Dimanche, le RCT affronte Montpellier, club dans lequel vous avez joué treize ans. Espérez-vous jouer? Ou être mis au repos pour ne pas vous retrouver face à des amis?
C’est le premier match que j’ai coché sur le calendrier (rires).
Il y aura pas mal d’émotion, ce sera particulier de voir le maillot bleu de l’autre côté mais je me sens heureux à Toulon et j’ai envie de défendre ces nouvelles couleurs, même si ce sera face à des amis. Et puis comptez sur eux pour ne me faire aucun cadeau!
Continuez-vous de regarder les matchs du MHR?
Tout le temps (rires).
Pourtant, pour la première fois, vous allez souhaiter une défaite de Montpellier…
Et j’espère même qu’on va leur rouler dessus (rires). Après le match, certains vont venir à la maison. Je suis lié pour toujours avec ces mecs, car on est les premiers à avoir remporté le Brennus avec Montpellier.
Qui, aujourd’hui, peut dire qu’il a remporté le premier Brennus de son club? C’est rare. Nous tenions si fort à marquer l’histoire du MHR…
Comment ne pas être dépassé par le trop-plein d’émotions?
Je n’en ai aucune idée, puisque ce sera la première fois (rires). Mais je suis un joueur qui ne cherche pas à cacher ses émotions. Ça me procure des sensations spéciales. J’aime ne pas tout maîtriser, être dans une position de “faiblesse”, pour voir comment réagit mon caractère. Et je ne cherche jamais à m’enlever la pression. J’ai besoin d’être dans l’inconfort, à me demander si je vais y arriver.
C’est une source de motivation. Cette petite peur me galvanise. J’aime me sentir en danger.
Dans un rugby toujours plus pro, où on cherche à maîtriser chaque scénario, c’est rare comme discours…
Tout maîtriser me met en difficulté. J’ai besoin de vivre mes émotions, de me pousser dans mes retranchements. Ça peut faire un peu maso mais c’est ainsi: je cherche à maîtriser le jeu, la stratégie mais je laisse les émotions vivre en moi.
Pour revenir au terrain: comment, alors que vous étiez une légende du MHR, pouvez-vous aujourd’hui vous retrouver de l’autre côté de la barrière?
J’ai reçu une offre de prolongation mais, à mon goût, elle aurait pu arriver plus tôt… Avant ma blessure [ligaments croisés du genou droit en septembre 2021], nous étions d’accord. Mais cette dernière a tout remis en question. Certains se sont demandé si je reviendrais, et dans quel état. Mais moi, j’étais déterminé à continuer ma carrière. Alors j’ai attendu, attendu, car je n’avais pas envie de partir.
Continuez…
Moi, je voulais finir à Montpellier, et il n’était pas question de discuter avec d’autres clubs.
On m’avait dit de ne pas me faire de souci… Sauf qu’au moment de revenir, rien ne m’était proposé.
Ç’a continué de traîner: on me faisait une proposition, puis on revenait dessus. Ça commençait à m’agacer, et Toulon est entré dans la danse, m’a proposé deux ans de contrat et j’ai accepté…
Peut-être que le club de Montpellier, sans vouloir me le dire, avait envie d’écrire une nouvelle histoire, de tourner une page… Alors je me suis dit pourquoi pas. Toulon était ambitieux, puis c’est un club à part, avec une ferveur unique, que je voulais connaître avant d’arrêter. C’était une chance à saisir. Puis qui ne rêve pas de finir sa carrière à Toulon? C’est comme une deuxième jeunesse pour moi.
Qui ne rêve pas de finir sa carrière à Toulon? ”
Avez-vous eu le sentiment d’avoir été “traité” comme un joueur acquis? Ce qui a peut-être contrarié le compétiteur que vous êtes…
Peut-être qu’on se dit qu’un joueur présent depuis treize ans ne peut pas partir. Tout le monde était convaincu que j’allais rester, que je n’avais pas le courage de me mettre en danger, de partir. Mais je suis un compétiteur et le danger ne me fait pas peur.
Ressentez-vous une forme d’aigreur?
Certainement pas. Tout n’a pas toujours été tout rose mais j’ai une histoire particulière avec Montpellier. J’ai aimé ces treize saisons, et tout le monde sait que j’aurais aimé rester. Maintenant, ça ne s’est pas fait et je ne veux pas faire le mec aigri, fâché. Ce club, je l’aimerai toute ma vie. Je ne cracherai jamais dans la soupe. J’étais bien au MHR, j’y ai vécu mes plus belles années et je ne voulais pas faire le marchand de tapis à entrer dans d’interminables négociations.
Que vous ont dit Franck Azéma et Pierre Mignoni pour vous convaincre?
J’ai senti des entraîneurs qui voulaient vraiment que je vienne. Ils m’ont expliqué que je serai un élément important et qu’ils voulaient des joueurs de caractère. J’ai perçu une volonté sincère et, comme je marche à la confiance, ç’a matché.
N’est-ce pas effrayant de débarquer dans un nouveau vestiaire à 34 ans?
Je suis entré dans le vestiaire comme si j’en avais 22. Je suis arrivé sur la pointe des pieds, j’ai observé, respecté les leaders en place et l’écosystème du groupe.
Et je voulais d’abord gagner la confiance avant de m’imposer… Puis c’est bizarre mais j’avais peut-être une forme de lassitude mentale de toujours tout gérer à Montpellier. D’être dans les réunions leaders, de donner mon avis… À Toulon, des mecs étaient en place et je n’ai pas eu à me préoccuper de cela. Et ça m’a fait du bien de n’avoir la tête qu’au rugby. Bon, j’aurais probablement envie d’y revenir à un moment, j’ai d’ailleurs été intégré au groupe de leaders cette semaine (rires), mais cette période m’a permis de me recentrer.
Qu’avez-vous découvert depuis votre arrivée?
Ce qui m’a marqué en arrivant, c’est le poids de l’histoire. Tu vois des posters des joueurs, des présidents, des entraîneurs.
Les anciennes gloires passent au centre d’entraînement et c’est un héritage qu’il faut respecter.
On doit être fiers d’avoir la responsabilité de continuer à écrire cette histoire, qui fait l’essence des grands clubs. Montpellier est en train de l’écrire et Toulon doit la poursuivre, et ça se sent.
À Toulon, Baptiste Serin est très performant depuis son arrivée en 2019. Quel rapport entretenez-vous?
On s’entend super bien, et ça nous fait du bien de bosser ensemble. On partage nos points de vue, on échange et je pense que ça lui permet de gérer moins de choses sur le poste. Puis vous savez, on parle le même rugby avec Baptiste. On se le dit souvent mais quand je vais voir un mec pour lui dire que je pense qu’il faudrait qu’il fasse ça, on me répond souvent: “Baptiste m’a dit la même chose.” On se ressemble dans la manière de jouer, on est très instinctifs et on s’entend très bien.
À 34 ans, pensez-vous encore pouvoir progresser?
Il n’y a pas d’âge pour progresser. Et rencontrer de nouveaux joueurs te permet d’échanger sur ta vision du rugby, sur ta perception du poste. Bon, après il y a des bases où, avec l’âge, tu ne pourras plus progresser, comme la vitesse (rires). Mais ça te pousse à chercher d’autres solutions, c’est très riche.
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