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Plutôt en vue dans le jeu à la main, la demi d’ouverture Caroline Drouin a en revanche péché dans le jeu au pied. Une défaillance qui a trouvé son expression la plus cruelle dans sa tentative de pénalité de la gagne, manquée sur le gong. Inconsolable, ses partenaires témoignent de sa peine…
Les buteurs sont une confrérie à part, dans le monde du rugby. Ils savent qu’ils peuvent être tantôt portés au pinacle comme cloués au pilori. Tout simplement parce que leur adresse et leur précision peuvent changer des cours des rencontres. La demi d’ouverture Caroline Drouin en a fait la douloureuse expérience ce soir, à l’Eden Park d’Auckland. Comme à son habitude, la Rennaise a donné son maximum pour animer le jeu des Bleues au centre du terrain. Elle s’est montrée mordante balle en main, a attaqué la ligne, battu trois défenseuses, a permis de conserver quelques ballons très précieux en se jetant dans les rucks… et s’est encore montrée efficace en défense avec un 8/9 face à de redoutables attaquantes.
Le problème, c’est que la patronne du jeu français a eu davantage de difficultés dans le jeu au pied. Une touche non trouvée, un jeu au pied direct en touche, puis un renvoi direct le tout avant la mi-temps. En deuxième mi-temps, quand les remplaçantes adverses ont redonné un coup de fouet à l’attaque kiwi, elle n’a, avec les autres buteuses de l’équipe, pas été en mesure de les renvoyer chez elles. Les torts sont donc partagés sur ce plan : « Le match s’est joué sur des difficultés à sortir de notre camp, par le pied, reconnaissait le sélectionneur-entraîneur Thomas Darracq. Sur ce secteur, ce n’est pas notre meilleur match de la saison. » Ainsi acculées, les Tricolores ne sont pas suffisamment mises hors de portée des buteuses adverses, l’arrière Renée Holmes et la demi d’ouverture Ruahei Demant, auteures de six points qui ont tout forcément tout changé.
Jusqu’à ce dernier baroud d’honneur des Bleues, cette ultime offensive qui conduira au plaquage haut de la pilier remplaçante Santo Taumata sur la talonneuse Agathe Sochat, aussitôt sanctionné d’un carton jaune et d’une pénalité, laquelle était située à 35 mètres légèrement à droite des poteaux. Les Bleues n’avaient qu’un point de retard. Mais le ballon frappé par Caroline Drouin passa complètement à gauche des poteaux, en plus d’être trop court. Témoin de la scène depuis le banc de touche, la deuxième ligne, Céline Ferer, rembobine quelques instants en arrière : « À ce moment-là, mais je croise les doigts pour que les Néo-Zélandaises fassent une faute. Et puis il y a le carton. À mon sens, la décision de prendre les points était la bonne, car il ne restait plus assez de temps pour aller en touche. Et puis la touche est aussi aléatoire qu’un tir au but : on s’expose à un contre, on peut manquer le lancer… il y a mille choses qui font qu’on peut se louper. La décision a donc été prise sur le terrain, entre Gaëlle (Hermet, N.D.L.R.) et Caro, et elles ont convenu que quoiqu’il arrivait, on resterait toutes ensemble. » Et puis le pied de la Rennaise l’a trahie. En vérité, elle ne paraissait pas à son aise à ce moment-là. La fatigue accumulée pendant ces longues semaines et ces matchs (elle est l’une des Françaises les plus utilisées de l’effectif, et ne ménage jamais ses efforts) a certainement joué. La pression ? Peut-être… L’absence d’autre buteuse en confiance qu’elle sur le terrain ? On lui posera la question une fois qu’elle acceptera d’aborder ce douloureux sujet.
Après la rencontre, elle était logiquement inconsolable : « Elle était en larmes, et on n’aime pas voir notre petite Caro comme ça, grimaçait Ferer. Cela nous a fait mal au cœur. Elle s’en voulait. Alors on lui a toutes dit que ce n’était pas sa faute, et qu’on avait besoin d’elle pour la suite. L’idée était de se remobiliser, de lever la tronche. On se tenait toutes la main. » Et elle n’était pas la seule : « Je peux comprendre son sentiment de culpabilité, mais on était toutes dans le même état, reprend la deuxième ligne toulousaine. Émilie (Boulard) était en pleurs à cause de l’essai casquette marqué par Tui devant ses yeux, Safi (N’Diaye) était au bout du rouleau d’avoir pris son carton jaune alors qu’elle était pleine d’envie, moi j’ai mal annoncé en touche et on a perdu un lancer. On a toutes fait un truc qui tombait mal. Mais c’est comme ça. »
Alors le groupe s’est resserré autour sa chef d’orchestre : « On l’a toutes prise dans nos bras. Tout le monde était triste, mais encore une fois on n’a pas à rougir. Certaines s’en voulaient plus que d’autres à cause de ces faits de jeu mais bon… on a toujours dit qu’on faisait les erreurs ensemble. » Le lendemain, Céline Ferer, bien connue dans le groupe pour sa bonne humeur permanente et son enthousiasme communicatif a déjeuné avec la demi d’ouverture : « J’étais à côté d’elle, et ses petits yeux étaient gonflés… Mais aujourd’hui on s’est toutes laissé le droit d’être un peu triste, histoire de décharger. Demain, on repart sur une semaine de préparation pour les Canadiennes. »
Car il reste encore un dernier challenge à la Rennaise et à son équipe pour montrer que leurs efforts ne méritent pas de se résumer à un coup de pied : un match pour la troisième place qu’elles joueront contre le Canada, samedi prochain à 16 h 30 heure locale (4 h 30 heure française). « Caro fait 80 minutes de folie, on ne peut pas lui en vouloir, conclut Ferer. Le match s’est joué avant. C’est un fait de jeu parmi tant d’autres. » Mais les Bleues lui ont tout de même demandé une chose : « On lui a demandé de nous promettre de relever la tête, parce qu’on a besoin d’elle pour aller chercher cette troisième place. Il faudra jouer ce match comme une finale, car ça en sera une. »
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