En dépit de votre rupture du ligament postérieur du genou, contractée lors de votre déplacement à Perpignan le 31 décembre dernier en Top 14, vous ne serez pas contraint à l’opération. Cette solution est-elle le résultat d’une réflexion ?
Il n’y a pas eu de décision à prendre. J’ai fait des examens suite à cette blessure, mais on n’arrivait pas vraiment à voir ce qui se passait dans le genou. Notamment au niveau de mon ligament croisé antérieur déjà opéré il y a 15 ans. C’est pour cela qu’on a dû attendre une dizaine de jours. Le chirurgien que j’ai vu ensuite à Bordeaux m’a dit qu’entre les images et ce qu’il ressentait au toucher, ce n’était pas nécessaire d’opérer. Pas mal de joueurs jouent sans ligament postérieur…
Il n’y a pas eu de décision à prendre. J’ai fait des examens suite à cette blessure, mais on n’arrivait pas vraiment à voir ce qui se passait dans le genou. Notamment au niveau de mon ligament croisé antérieur déjà opéré il y a 15 ans. C’est pour cela qu’on a dû attendre une dizaine de jours. Le chirurgien que j’ai vu ensuite à Bordeaux m’a dit qu’entre les images et ce qu’il ressentait au toucher, ce n’était pas nécessaire d’opérer. Pas mal de joueurs jouent sans ligament postérieur : ce n’est pas quelque chose qui empêche d’évoluer à haut niveau. C’est une bonne nouvelle, parce que pendant deux semaines, je suis resté dans le doute. Je redoutais de devoir passer au bloc et repartir de zéro après six ou neuf mois de convalescence. Ça voulait dire faire une croix sur la Coupe du monde. Là, je serai apte pour la fin de la saison.
Vous en aurez finalement pour six ou huit semaines…
Je récupère bien pour le moment, je n’ai pas de douleur. Mais ça dépendra surtout de la cicatrisation du ligament. C’est pour cela que je dois tout le temps garder l’attelle.
Subir une telle blessure à quelques mois de la Coupe du monde, cela n’impose-t-il pas une idée de course contre la montre pour revenir ?
Non. En termes de timing, six à huit semaines, ça peut m’amener au milieu du Tournoi. Tout dépendra de la manière dont je récupère et de mon niveau de performance avec le club.
Vous espérez disputer les derniers matchs du Tournoi ?
Sincèrement, c’est un peu trop tôt pour songer à cela. J’attends déjà de reprendre la course. On verra ensuite mon état physique : s’arrêter six à huit semaines, c’est quand même une longue période.
Cette blessure survient alors que vous vous êtes enfin imposé en équipe de France. Comment l’avez-vous encaissé ?
Année de Coupe du monde ou non, je sais que ce risque existe. On voit d’ailleurs que c’est un peu délicat en ce moment avec le nombre de blessures. J’en avais discuté avec le doc, il m’a expliqué que c’est toujours à cette époque de l’année que les joueurs sont un peu plus fragiles. Notamment avec les Fêtes de fin d’année. À cette période, on est un peu sous-entraîné en raison des modifications de planning : on est au club que deux ou trois jours par semaine alors qu’habituellement, c’est plutôt cinq ou six. On court moins, on fait moins de musculation…
Le jour de votre blessure, c’est aussi celui où vous vous êtes accroché sur le terrain avec Mathieu Acebes (1)… Avez-vous eu l’occasion de discuter avec lui depuis ?
Non. Je ne pense pas que ce soit nécessaire. J’ai reçu quelques messages de supporters catalans drôles et sympathiques (sourire ironique). Heureusement, il n’y a rien eu de grave ce jour-là. Mais comme je l’ai dit à ma femme en rentrant chez moi, je n’ai qu’une petite bosse cette fois-là, mais si je me fais péter une vertèbre ou une cervicale, comment ça se passe ? On le voit encore dans l’actualité avec ce jeune garçon qui a fini tétraplégique suite à un plaquage dangereux (2). Il y a tellement d’actions à la limite, alors si on commence à accepter ces choses… Mon corps, c’est mon outil de travail.
Est-ce un sujet qui vous tient à cœur ?
Je comprends que des joueurs puissent péter un câble. Ça m’est arrivé quand j’étais plus jeune, des supporters se sont chargés de me le rappeler en m’envoyant les images d’un accrochage que j’avais eu avec Vincent Clerc. Mais la différence, c’est que je n’avais qu’une vingtaine d’années et que le joueur en face de moi n’était pas au sol. Mais ça ne sert à rien de raviver la flamme : je pense qu’il regrette pour lui, comme pour son équipe. Au-delà de tout ça, je trouve que c’est un joueur qui apporte beaucoup à son club, il renvoie une image très forte de solidarité. Si je suis amené à recroiser Mathieu, on en rediscutera peut-être : je ne le connais pas, mais on m’en a souvent dit le plus grand bien. C’est le geste qui me dérange, pas la personne.
Mathieu Acebes a écopé de neuf semaines de suspension. Qu’en pensez-vous ?
La sanction a été quasiment divisée par deux. On sait qu’en commission, un bon comportement et des excuses amènent toujours une réduction de peine. Bon… Maintenant, le prochain qui commettra un tel geste prendra neuf semaines aussi. Si le joueur en face est contraint d’arrêter sa carrière, qu’est-ce qu’on en dira ?
Lors de la tournée de novembre, face à l’Afrique du Sud, vous aviez été victime d’un déblayage particulièrement violent. Ce précédent a-t-il eu une influence sur votre réaction ?
C’est possible… C’est vrai que l’action y ressemble. Je me suis d’ailleurs demandé si inconsciemment, lui aussi n’avait pas été influencé par le précédent avec Du Toit. Mais cette réaction, c’est aussi mon caractère ! C’est moi qui ai pris le « coup de cabine », personne d’autre (rires). Comme j’ai eu l’occasion d’en parler avec ma compagne également, il y a tellement d’actions dans le rugby où tu peux marquer ton adversaire dans les règles !
Ces épisodes ont-ils participé à vous sensibiliser encore plus à la question des commotions ?
Je ne l’ignorais pas avant : on voit de plus en plus de joueurs qui arrêtent leur carrière suite à des commotions. Mais en subir une parce que je mets la tête du mauvais côté et que j’ai pris la hanche du type dans la gueule, c’est une chose. Une agression gratuite, c’en est une autre. C’est dans ces moments-là qu’il faut faire la part des choses.
Quel regard portez-vous sur le débat portant sur la dangerosité du rugby ?
Il y a tellement d’actions délicates à juger : les joueurs courent plus vite, les impacts sont plus forts, les temps de jeu plus longs amènent à des niveaux de fatigue plus élevés qu’auparavant… Depuis mes débuts en 2010, beaucoup de règles ont évolué malgré tout : les joueurs sont plus en sécurité.
(1) Le capitaine de Perpignan, auteur d’un coup de tête sur Jonathan Danty, a été reconnu coupable de brutalité. (2) Un élève de 17 ans est devenu tétraplégique après un plaquage lors d’un match de rugby scolaire à Tarbes (Hautes-Pyrénées) en décembre.