Le saviez-vous ? L’épicentre du projet sportif de l’Aviron Bayonnais se situe à…
Le saviez-vous ? L’épicentre du projet sportif de l’Aviron Bayonnais se situe à… Nantes. Oui, en Loire-Atlantique. À 530 km de Jean-Dauger. Ce n’est pas si fou, en regardant le récent passé des nouveaux entraîneurs ciel et blanc. Choisi dès l’automne dernier comme futur manager ciel et blanc, Grégory Patat, encore basé à La Rochelle, jette son dévolu sur Gerard Fraser comme adjoint. Le Néo-Zélandais de 43 ans est responsable des lignes arrière à Vannes (Pro D2). Les deux hommes ne se connaissent pas. Ils apprennent à se découvrir à mi-route, à Nantes, donc. « On mangeait ensemble, on discutait rugby, raconte le second. À Vannes, j’ai eu des joueurs passés par La Rochelle entre les mains de Greg. Humainement et rugbystiquement, il a dû avoir des échos de leur part, leur faire confiance. »
Et voilà comment, quinze ans plus tard, la carrière de « G » Fraser passe de nouveau par le Pays Basque et l’Aviron Bayonnais. « Quand je l’ai dit à ma femme, elle a trouvé ça dingue ! Je ne dis pas que ça referme une boucle, mais c’est le destin. J’ai toujours une histoire avec ce club. »
Été 2005, le demi d’ouverture découvre le rugby français en bord de Nive. Deux saisons pleines (42 matches, 39 titularisations) et énormément de souvenirs. « J’ai toujours gardé en tête cette ambiance, ce public qui pousse fort derrière. Je connais le club, l’environnement, la ville, la région. J’étais très motivé à l’idée d’y revenir quinze ans après, dans un autre rôle. C’est très sympa. »
C’est aussi un joli clin d’œil intime. Gerard et Michela, Italienne rencontrée lors de son séjour à Calvisano, se sont mariés à la mairie de Bayonne, en 2005, avant de poursuivre les festivités à l’intérieur du Pays Basque, à Iholdy. Le couple est installé aujourd’hui au nord de Bayonne, loin de l’agitation du centre-ville. « Je préfère les espaces à la ville », sourit le natif de Rangiora, petite commune à une quarantaine de kilomètres au nord de Christchurch.
Le numéro 2 dans l’organigramme monte d’un cran quand il s’agit d’animer les séances d’entraînement. Casquette à l’envers, Gerard Fraser donne de la voix au milieu des joueurs bayonnais. « J’aime bien le terrain, je ne suis pas trop bureau, plaisante l’ex-joueur de l’UBB et de Béziers. Je reçois les feed-back de Greg qui voient les choses avec du recul. On est connecté avec les oreillettes, mais de toute façon, on a planifié les séances avant d’aller sur le terrain. »
Les deux ont élaboré conjointement le projet de jeu bayonnais. « Le peuple basque a une forte identité. On veut une identité de jeu qui corresponde aux gens. » Traduction ovale ? « Ce sont des qualités dans le jeu dans le désordre, du jeu de turnover, de contre-attaque, de transition. On veut tenter des choses que l’adversaire n’attend pas, avoir de l’audace. Et avec cela, on doit avoir la grinta, l’envie de s’accrocher, de gagner les contacts, de se battre l’un pour l’autre… » Ambitieux.
Si l’audace suffisait pour gagner des matches et se maintenir, ça se saurait. Greg Fraser ne va pas jusque-là. « On doit avoir un équilibre. Savoir quand on peut, quand on ne peut pas, quand on doit et quand on ne doit pas. Ça, c’est primordial. Mais il faut avoir de l’audace, avoir l’idée de repousser les barrières, pas être simplement content de récupérer le ballon. Si on s’ennuie, si on est neutre, qu’on se contente juste de jouer et qu’on ne cherche pas les opportunités qui arrivent dans le jeu, ce ne sera pas suffisant. Une partie de notre rôle est de montrer les scénarios qu’on peut rencontrer, voire qu’on doit chercher dans le jeu. Il faut encourager la confiance des joueurs pour leur donner l’envie de jouer les situations, qu’ils n’aient pas peur. »
Avec six essais en deux matches, ils digèrent plutôt bien la nouvelle feuille de route, avant de se rendre au Stade Français, ce samedi à 17 heures. « C’est une autre façon de voir le rugby, apprécie le demi de mêlée Guillaume Rouet. C’est clairement lui qui s’occupe de l’organisation défensive et offensive, du rugby. Il est beaucoup dans le jeu, il y a beaucoup de skills dans les ateliers d’entraînement, beaucoup d’échanges, de retours individuels sur les matches. Il a beaucoup d’idées pour la stratégie de jeu mais il est aussi à l’écoute des joueurs. Quand il voit que c’est difficile à mettre en place ou trop compliqué, il s’adapte à nous et vice versa. Il nous demande ce qu’on préfère. »
Un management participatif et progressif. Car à part Camille Lopez, avec qui il a évolué à Bordeaux-Bègles, Gerard Fraser ne connaissait personne en arrivant. Seulement l’Aviron, ce club qu’on appelle par son prénom. A-t-il changé, en une quinzaine d’années ? « Les tribunes, oui. Il n’y a plus la piste d’athlétisme. Et on ne s’entraîne plus à la Floride. Les infrastructures et organisations ont grandi, mais le plus important est resté : le cœur du club. Son identité. Ce soutien, cette ferveur, c’est impressionnant. »
Et le technicien de savourer, samedi dernier face au Racing (31-25), sa première « Peña » dans son nouveau rôle. « J’étais en haut de la tribune, dans la boîte (sic), et je suis sorti pour sentir l’atmosphère. J’ai eu des frissons, livre-t-il en montrant son bras, ses yeux couleurs aviron encore émerveillés. C’est une chose simple, un vrai plaisir de la vie que je garderai toujours en moi. Quand je parle d’ici à mes parents ou amis, je ne leur envoie pas des vidéos de rugby mais du stade. Quand tu entends cette ambiance, tu sens aussi ta responsabilité. Putain, il faut que j’entraîne bien pour respecter ce patrimoine ! »