Le langage corporel dit beaucoup. Demandez à Grégory Patat. Samedi dernier, le manager n’a pas hésité à procéder très tôt à des changements. Éreintés, ses joueurs lui envoyaient des signaux inquiétants. Sans conséquence. Ils ont battu Toulouse (26-22), pour leur cinquième victoire en cinq matches à domicile.
Jouons au même jeu. Sitôt la victoire entérinée, le technicien s’est présenté devant les médias. Dans son propos, une forme d’aveu. L’équipe serait remaniée à Clermont. Fatalement. Des joueurs tirent la langue. Gaëtan Germain et Guillaume Rouet, par exemple, ne sont pas passés par la case entraînement ce jeudi. Repos complet. Des cadres comme Rémy et Swan Cormenier restent aussi en civil. Sur le XV de départ, onze changements d’une semaine à l’autre. Colossal. De quoi donner des allures d’impasse à ce déplacement en Auvergne. Une première en même temps qu’une contradiction avec le discours affiché – et appliqué – depuis l’été.
Grégory Patat bat l’argument en brèche. Ce n’est pas une impasse. Le contexte l’oblige à un remaniement : fatigue, absence des internationaux (Maqala, Mikautadze, Leindekar, Amosa, Bogado), blessés (Bethune, Lestrade, Duhau, Monribot) et nécessaire besoin de relancer, et concerner, des éléments pas ou peu utilisés (Pourailly, Muscarditz, Robertson, Ruru…). « On a fait un gros match le week-end dernier, raconte le Gersois. Cette rencontre face à Clermont intervient alors que les objectifs de résultats sont atteints à domicile et surtout, qu’il y a des vacances derrière. Ça peut être problématique. Il y a eu une mobilisation cette semaine parce que sinon, ça va être compliqué. »
Tout le danger est là. Un résultat négatif au stade Michelin n’impacterait pas le sentiment général de deux premiers mois de compétition quasi idylliques, « mais on se quitterait sur un goût amer », reconnaît le manager, qui craint la décompression. Peyo Muscarditz comprend le raisonnement. « Il y a une certaine satisfaction des cinq victoires à la maison et donc un peu de relâchement. Enfin, pas de relâchement mais… » Le trois-quarts centre, de retour comme titulaire, soupèse toujours ses mots pour utiliser le bon. Il ne le trouvera pas cette fois. « Il ne faut pas qu’on passe un match cauchemar », résume-t-il. En mémoire, le souvenir du dernier déplacement. Un violent 73 à 3.
« Il y a un peu une crainte chez chaque membre du staff et des joueurs, poursuit l’ancien capitaine. Ce match, on doit l’aborder comme un bonus. On a l’occasion d’aller là-bas sans trop de pression du résultat mais avec l’ambition de mériter nos vacances après. » Ils retrouveront le chemin de Jean-Dauger le 16 novembre.
Grégory Patat passera peut-être les siennes en Soule. Sans jamais sortir la carte bleue. Et pour cause : il glisse trois Mauléonnais dans son groupe des 23, dont deux pour la première fois de leur carrière au niveau professionnel. Yohan Orabé commencera à l’arrière. Arnaud Erbinartegaray patientera sur le banc, avec Camille Lopez, qui aurait pu être mis au repos. Mais la tentation était trop forte pour l’ouvreur, après huit années passées en jaune et bleu. Tous voudront montrer quelque chose.
Comme Baptiste Heguy, de retour après deux mois loin du groupe. Comme Eneriko Buliruarua, lui aussi stoppé en plein élan et revenu la semaine dernière. Comme Matis Perchaud, auteur d’un début de saison décevant et relégué au second plan au poste de pilier gauche. C’est la chance de l’Aviron. Le turnover est important, mais des aspirants frappent à la porte. C’est leur chance. « On a envie de s’inviter à la fête, avoue Peyo Muscarditz. On a envie que les coaches se triturent un peu la tête. On a envie de jouer pour mériter nos places après, pour bousculer un peu la hiérarchie. » L’occasion est belle.
Elle nécessite deux, trois ajustements. L’Aviron prend 32,5 points de moyenne en déplacement. Beaucoup trop. La faute à une indiscipline chronique. Six des huit cartons jaunes récoltés par Bayonne l’ont été loin de Jean-Dauger. « Et on prend 9 points en moyenne durant ces périodes d’infériorité numérique », rappelle Patat. C’est un axe de progression. « On veut du contenu pour avancer dans notre process qui doit nous mener au maintien. Notre marge de manœuvre est limite. Si on ne s’appuie que sur les matches à domicile, ça va être compliqué. Peut-être qu’on aura un coup de moins bien à Dauger. Personne n’est à l’abri. » D’où l’intérêt d’éviter une déconvenue et de ramener quelque chose de Clermont. Ça en dirait beaucoup sur le « body language » d’un candidat au maintien.