Cinq cent soixante-six jours d’invincibilité, pas un de plus. Depuis la défaite contre Soyaux/Angoulême (14-18), le 2 avril 2021, et le spectre d’une relégation en Nationale finalement évitée, les Montois avaient réussi l’exploit d’aligner 19 victoires consécutives à Boniface – en saison régulière de Pro D2 – et de terminer le championnat 2021-2022 invaincus à domicile. Une performance que Patrick Milhet et ses hommes souhaitaient réitérer durant cet exercice, « le smic » comme aime la qualifier le manager stadiste.
Ce jeudi soir, les jaune et noir n’ont pas franchement été mal payés. Car le succès bonifié d’une formation agenaise impressionnante de sérénité (11-33) ne souffre d’aucune contestation. Dans une colère froide à l’issue du succès étriqué contre le SA XV (34-26), le 7 octobre, Patrick Milhet n’a, cette fois, pas voulu accabler ses joueurs. « La fin de la série ? Il fallait bien que ça arrive un jour… Mais c’est mérité. On ne peut pas gagner un match à partir du moment où on ne sait pas jouer avec le vent. Je ne suis pas en colère, il faut simplement que l’on progresse dans la prise en compte des paramètres extérieurs. On n’a pas su jouer chez eux, les presser et les mettre à la faute. Et on l’a payé cash. »
En première période, il y a bien eu ces bourrasques qui ont poussé les Landais à la faute en touche (deux perdues), qui faisaient s’envoler les bancs de touche et qui obligeaient les Agenais à stabiliser le ballon à la main sur les tirs au but de Raphaël Lagarde (11 points jeudi soir). Et les hommes de Bernard Goutta ont parfaitement su l’exploiter : après avoir gagné le « toss », ils avaient décidé de faire face à Éole pendant les 40 premières minutes. « On a fait un bon choix », apprécie l’entraîneur des avants Dave Ryan, fier de la prestation d’un SUA qui a enchaîné un quatrième succès de prestige après celui à Biarritz (15-18), une semaine plus tôt.
Mais la météo ne suffit pas à tout expliquer. Dominés dans les rucks, l’occupation et la possession, les Montois n’ont pas pu, non plus, s’appuyer sur leur mêlée – le point positif du début de saison – face à un pack lot-et-garonnais qui faisait mieux que leur tenir tête. Dans le jeu courant, ce n’était guère plus brillant, entre erreurs techniques, ballons hauts – encore – mal négociés (précédant l’essai d’Etcheverry, 25e) et indiscipline qui allait crescendo.
« Forcément, c’est une grosse déception, reconnaît le trois-quarts centre Jules Even. En première mi-temps, on s’est un peu pris la tête pour sortir de notre camp (6-15 à la pause, NDLR). Eux ont fait des choses simples, des combinaisons 9-10 et ils tapaient loin. Nous, on faisait ce temps de jeu supplémentaire, on n’était pas précis dans les rucks, on a peiné dans l’occupation. »
Ses partenaires n’ont jamais donné l’impression de pouvoir renverser leurs adversaires, dans un Boniface aussi rempli pour ce « derby » (7 745 spectateurs) que désabusé. Même après l’essai de Laousse-Azpiazu (11-21, 57e), sur une erreur défensive qui aurait pu instiller le doute dans les têtes agenaises. Au contraire, le SUA réenclenchait la marche avant pour aller chercher un bonus offensif – presque impensable avant la rencontre – sur un ballon porté à 5 mètres (Feagai, 80e +2).
« Ils nous ont pressés chez nous sur leur jeu au pied, poursuit Patrick Milhet. On a eu du mal à sortir, on s’est mis à la faute, il n’y a rien à dire. L’absence de révolte ? Avec le nombre de jeux au pied qu’il y a eus, c’était compliqué. Les joueurs, pourtant, ils y étaient. On ne peut pas dire que la défense a été mise à mal, bien au contraire. On a une conquête qui est quand même correcte et je n’ai pas le sentiment qu’il n’y a pas eu d’engagement. Mais à partir du moment où on joue à l’envers, on peut mettre toute la détermination que l’on veut, ça devient compliqué de mettre les adversaires à mal. »
Cette troisième défaite en quatre journées confirme un peu plus la période de moins bien des jaune et noir, désormais neuvièmes, depuis les succès prometteurs face aux « gros » Biarritz (27-29, le 9 septembre) et Oyonnax (26-15, le 16 septembre). À l’instar de l’invincibilité à domicile, l’objectif de meilleure défense, après un cinquième essai encaissé dans les dix premières minutes (Lamoulie, 7e) en huit matchs, n’est déjà plus d’actualité (26 points encaissés en moyenne, 14e défense de Pro D2 – 5e attaque).
« Vexé » par ce revers sans appel contre un rival régional, Milhet assure qu’il « n’est pas inquiet. Mais j’attends énormément de ce match à Massy (vendredi, 19 h 30). Inquiet, peut-être que je le serai le week-end prochain, mais j’ai entièrement confiance en ce groupe. On va retrouver l’équipe. » « À nous d’aller là-bas, de faire un gros match, affirme Jules Even. Et d’être humbles, surtout. »