Lors du dernier Tournoi des VI nations, la Finistérienne Marie-Aurélie Castel portait le dossard numéro 11 de l’équipe de France de rugby. Avant cela, elle a goûté de la danse classique, du basket et des arts martiaux. Rencontre avec cette sportive atypique de 22 ans.
À 3 ans, elle enfilait chaussons de danse et tutu. Vingt ans plus tard, elle porte le maillot de l’équipe de France de rugby à XV. Drôle de parcours que celui de la Finistérienne, Marie-Aurélie Castel. Pour éclaircir ce cas d’école, rendez-vous était donc pris en cette fin d’année 2022.
Le jour de la rencontre, c’est une jeune femme de 22 ans, avenante et souriante qui arrive. Petit sac à dos à l’épaule, elle tire une grosse valise, siglée “FFR” (Fédération française de rugby).
Sitôt descendue du TGV à Rennes, Marie-Aurélie a filé tout droit dans l’avenue Janvier face à la gare pour se faire interviewer dans les locaux de France 3 Bretagne. “Je me suis dit que ce serait plus pratique comme ça, sourit-elle. Passer ici avant de rentrer chez moi.”
En provenance du centre d’entraînement de Marcoussis
Baskets, pantalon en cuir, sweat, boucles d’oreille, Marie-Aurélie arrive tout juste de Marcoussis, au Sud-Ouest de Paris.
Marcoussis, le pôle d’excellence, le Clairefontaine du rugby. Pendant quatre jours, elle s’est entraînée au sein de l’académie olympique du rugby français.
Le sport de haut niveau, ça forge. Quand on quitte ses parents à 18 ans, qu’on part 3 semaines en stage… il faut se prendre en main.
Equipe de France de rugby à XV
Depuis quatre ans, la jeune femme s’est installée à Rennes. Elle a laissé sa famille à Gouesnou, près de Brest, à 18 ans pour intégrer le pôle élite du Stade Rennais Rugby. C’est dans la capitale bretonne aussi qu’elle suit son Master en sciences du numérique et sport.
Tasse de café en main, Marie-Aurélie explique ses projets. Elle aimerait devenir “sport scientist” dans le rugby pour “optimiser les performances et prévenir les blessures”. Le ton est posé, les propos précis, la voix douce.
Une maturité et une sérénité étonnantes. À cette remarque, elle sourit : “Le sport de haut niveau, ça forge. On voyage dans le monde entier. Quand on quitte ses parents à 18 ans, qu’on part 3 semaines en stage… il faut se prendre en main.”
Danse, basket, aïkido et…rugby
Le rugby est entré dans la vie de Marie-Aurélie un peu par hasard. “J’ai toujours eu besoin de bouger, s’amuse-t-elle. Dans la cour de l’école, on courait partout.“
Dès son plus jeune âge, elle pratique toute sorte de sport : danse classique pendant 10 ans, aïkido et basket. “J’ai adoré”, s’enthousiasme-t-elle.
Le basket lui donne le goût du sport collectif et renforce ses aptitudes physiques. “Je n’étais pas très technique mais ma rapidité et mes bons appuis, utiles pour les changements de direction, étaient mes principaux atouts.”
Une joueuse “explosive”
1,68 mètre pour 62 kg : elle se qualifie d’“explosive”. Une vélocité primordiale aujourd’hui dans son poste d’ailière.
“Sa vitesse lui permet de sortir rapidement de la zone de défense”, analyse Anne Berville, responsable de l’équipe élite au Stade Rennais Rugby.
De la danse classique Marie-Aurélie dit avoir “perdu toute sa souplesse”. En revanche ce sport qui sollicite les muscles profonds lui a apporté une bonne tonicité musculaire. “Je ne me blesse pas énormément”, constate-t-elle.
Détectée à 18 ans par la FFR
Papa était militaire, alors dès la seconde, direction le lycée naval de Brest. Là, il lui faut choisir un sport collectif. “Le volley et le foot, bof !”, grimace-t-elle. Elle opte pour le ballon ovale et tout commence…“J’ai fait du rugby pendant un an en UNSS (sport scolaire), l’intervenant nous a donné envie.”
Suit le club de Plabennec, les féminines du pays de Brest jusqu’à ce qu’elle soit détectée par la fédération française de rugby à 18 ans. “Le haut niveau m’est tombé sur la tête”, sourit-elle.
Je ne suis pas d’une famille où il fallait finir le cross la première.
Le goût de la compétition est là. Alors Mario, comme l’appellent ses coéquipières et ses entraîneurs parce que “c’est plus court sur le terrain” fonce.
Pourtant, elle avoue “ne pas être d’une famille où il fallait finir le cross la première”. Elle rit et poursuit : “J’aime me challenger, je fais les choses bien quand j’aime ce que j’ai à faire. Je suis déterminée.”
Une bosseuse
“Mario est passionnée par ce qu’elle fait et s’investit beaucoup, confirme Arnaud Le Berre. C’est une travailleuse.” Entraîneur des arrières au Stade Rennais, il la fait travailler sur le terrain. Mais Mario, c’est aussi celle qui l’aide dans la préparation physique des jeunes du pôle espoir.
“Travailleuse”, le terme vient à la bouche des deux entraîneurs quand ils évoquent Marie-Aurélie. “Elle fait beaucoup de choses par rapport au temps dont elle dispose”, souligne Arnaud Le Berre.
Mario, c’est la bonne humeur, la simplicité, la joie.
Responsable de l’équipe élite au Stade Rennais Rugby
Le goût de l’autre, l’altérité habitent la jeune sportive. Même si elle concède “ne pas pouvoir s’entendre avec tout le monde”, elle appuie sur “l’importance de l’unité”.
“Mario, c’est la bonne humeur, la simplicité, la joie, apprécie Anne Berville. Elle est souriante et apporte de la légèreté et ça, c’est appréciable dans un groupe.”
En 2019, les portes de l’équipe de France se sont ouvertes à Marie-Aurélie : d’abord comme remplaçante puis comme titulaire face à l’Afrique du Sud et à la Nouvelle-Zélande.
Certes les salaires des sportives sont encore bien loin de ceux de leurs confrères masculins, mais la jeune femme “ne veut pas se comparer aux gars.”
“Le rugby féminin se développe et il faut qu’il se développe encore. Si les médias s’y intéressent, l’argent rentrera dans les caisses”, assure-t-elle, confiante.
Au printemps 2022, Mario a joué lors du tournoi des VI Nations. Ailière, dossard numéro 11.
Malheureusement, pour la coupe du Monde féminine, qui s’est disputée à Auckland en Nouvelle-Zélande du 8 octobre au 12 novembre 2022, la jeune Bretonne figurait sur la liste d’attente et n’a pas fait partie du voyage.
Se fixer des objectifs “100% de son ressort”
Une déception bien sûr pour cette sportive de haut niveau. Mais, comme en toutes circonstances, Marie-Aurélie garde la tête froide : “Je n’étais pas au fond du trou, je ne m’étais pas mis comme objectif de participer à cette coupe de Monde. Évidemment, j’aurais été heureuse de partir.”
Se fixer des objectifs qu’elle peut tenir, “100% de [s]on ressort”, voilà la devise de Marie-Aurélie Castel. Et pour une sélection en coupe du Monde “trop de facteurs extérieurs interviennent, à commencer par la présence de meilleures joueuses”, conclut-elle, bonne joueuse.