HORS-TERRAIN Considéré comme une véritable discipline sportive par ses 200 licenciés en France, le football de table accueillera pour sa Coupe du monde, samedi à Rome, le premier représentant ukrainien de l’histoire
Une Fédération française de football de table (FFFT) peut en cacher une autre. Vous pensez spontanément aux compétitions de baby-foot, mais il existe aussi depuis quarante-deux ans en France une discipline pour les accros au Subbuteo. Une vingtaine de joueurs de football de table tricolores se retrouveront même samedi et dimanche à Rome, parmi 26 nations représentées, pour disputer la Coupe du monde. Inventé dès 1947, le mythique jeu de plateau adapte en miniature toutes les règles du football, ou presque. Pendant deux mi-temps de 15 minutes, puis une éventuelle mort subite de 10 minutes, les meilleurs joueurs français vont tenter de se hisser, grâce à la précision de leurs doigts, au bout du tournoi référence de Subbuteo.
Mais comment ces licenciés de football de table (200 en France, répartis dans une quinzaine de clubs) sont-ils tombés dans une telle passion de niche ? Professeur de français, Thomas Ponté (38 ans) se souvient d’avoir découvert son premier jeu Subbuteo sous le sapin de Noël, à l’âge de 8 ans, « comme tous les gamins de ma génération ». Dès 1992, il rejoint le FTC Issy-les-Moulineaux, club référence en France avec 17 participations européennes.
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Car il existe même depuis 2010 la Ligue des champions et la Ligue Europa, dans cette discipline qui a connu un pic d’engouement au cœur des années 1990, avec un millier de pratiquants dans l’Hexagone. « Systématiquement perçu comme un grand enfant » en raison de son étonnante passion depuis trois décennies, Thomas Ponté voit une dimension bien plus profonde dans le Subbuteo.
Actuel président de la Fédération française de football de table sport (FFFTS), Eric Naszalyi poursuit : « On a affaire à des préparations de sportifs de haut niveau avant chaque grande compétition, où il faut beaucoup de concentration pour résister à la pression. Pour chaque situation de jeu, il y a plusieurs centaines de choix possibles ». Championne du monde en titre, dans un univers majoritairement masculin, la Française Audrey Herbaut (32 ans) s’entraîne ainsi deux fois par semaine, et elle dispute en moyenne une compétition par mois.
« C’est selon moi à la fois un sport et un loisir, confie celle qui visera le doublé ce week-end à Rome. Ça occupe une grande partie de ma vie depuis que j’ai commencé à jouer, enfant, avec mon frère et mon père. » Ancien numéro un mondial, de 1993 à 1995, Eric Naszalyi se réjouit d’une mini-hype autour du Subbuteo. Sa discipline de cœur vient en effet d’intégrer le Paris Université Club (PUC) à Charléty, elle génère d’improbables audiences (jusqu’à 3 millions de vues parfois) via des vidéos de Subbuteo postées sur un compte TikTok dédié. Et, cherry on the cake, l’ancien emblématique milieu de terrain du PSG Laurent Fournier édite les maillots de l’équipe de France de football de table.
On est très loin de l’essoufflement constaté entre la fin des années 1990 et 2013, année clé ayant vu le Subbuteo être redistribué dans le commerce, avec Christian Karembeu en prestigieux guest publicitaire. A en croire ses pratiquants, le jeu a ensuite bénéficié d’un effet Covid-19. « Les quinquagénaires ont profité de cette période pour se replonger dans ce jeu qui avait accompagné leur enfance, et ils l’ont fait découvrir à leurs gamins », constate Thomas Ponté. « C’est l’une des rares disciplines intergénérationnelles, qu’on peut vraiment partager à tout âge », confirme Eric Naszalyi (55 ans), qui a transmis sa passion désuète, à l’heure du tout numérique, à son fils Paul (25 ans). Ce dernier sera lui aussi de la partie samedi à Rome.
« Grande famille » (dixit Audrey Herbaut), le Subbuteo donne lieu cet été à une histoire étonnante, puisque Thomas Ponté sera lors de cette Coupe du monde… le premier représentant ukrainien de l’histoire. Ex-président de la FFFTS (de 2012 à 2019), il a en effet vécu à Odessa (Ukraine) à partir de 2020, pour enseigner le français à des adultes non francophones au sein de l’Alliance Française. En janvier dernier, il a fabriqué une table de jeu exprès dans les locaux afin d’initier une dizaine d’élèves ukrainiens intrigués au football de table. « J’ai tenté de développer une discipline qui était totalement inconnue dans ce pays, car le Subbuteo n’a jamais été commercialisé là-bas, raconte-t-il. J’ambitionnais d’organiser en juin un championnat d’Ukraine qualificatif pour le Mondial. Mais… » La guerre a éclaté et Thomas Ponté est rentré vivre en France en février avec Irina, son épouse ukrainienne.
Le fondateur de l’association France-Ukraine football de table-Subbuteo garde alors un objectif : présenter une délégation ukrainienne de quelques membres pour la Coupe du monde à Rome. Mais le contexte en Ukraine rend ce projet injouable. 23 ans après avoir été finaliste du Mondial aux Pays-Bas avec l’équipe de France, dans la catégorie junior, Thomas Ponté va donc représenter seul le pays en guerre.
« Il a fallu que je parvienne à convaincre la Fédération internationale de me laisser jouer pour le pays de mon épouse, précise-t-il. L’Ukraine fait partie de ma vie, après ces deux années passées à Odessa. Je commence à parler la langue, j’ai appris l’hymne pour l’occasion, il y a une symbolique forte pour moi. Je veux honorer les joueurs ukrainiens qui ne peuvent pas partir de leur pays pour participer. C’est aussi un peu une bouteille à la mer pour que des institutions ukrainiennes me contactent un jour. » Le Subbuteo est visiblement bien plus qu’un simple loisir pour enfants, non ?
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