Vous avez trois ans de différence, mais vous avez tous les deux commencé le rugby à l’âge de 5 ans. Est-ce un hasard, ou chez les Ntamack on fait comme ça ?
Romain Ntamack: Non, c’est un hasard. Théo et moi avions envie de faire un sport, de ne pas rester à la maison et on a commencé tôt, au plus jeune âge. On avait envie de s’occuper, de ne pas rentrer à la maison après l’école et c’est le rugby qui nous a attiré tous les deux.
Théo, ça vous démangeait de voir Romain à l’école de rugby et de devoir attendre ?
Théo Ntamack: Oui ! On a trois ans d’écart et je venais le voir jouer tous les week-ends. Donc c’est sûr que dès que j’ai pu avoir l’âge, je me suis inscrit. Et pour moi c’était le rugby et pas un autre sport. Quand tu as un ballon de rugby dans les mains, c’est compliqué !
RN: C’est vrai qu’il y avait toujours un ballon de rugby qui traînait mais on n’a pas fait que ça. On faisait du rugby et d’autres sports à côté. On aimait jouer au foot, au tennis, au basket. Bon, c’est vrai que naturellement, même si on a essayé autre chose, le ballon de rugby l’emportait. Et on se faisait des scénarios tous les deux. On s’amusait à se plaquer, à jouer ensemble.
Ça ne devait pas être facile pour vous Théo, avec trois ans de moins que Romain…
TN: (sourire) Ouais, compliqué ! Pas eu beaucoup de victoire.
RN: J’en ai profité étant petit, parce que maintenant, ce n’est plus trop la même mayonnaise ! C’est vrai que forcément, en tant que grand frère, c’est moi qui avais souvent le dessus. Mais aujourd’hui, ce n’est plus trop la même chose. Ça permet de se forger entre frères. On a toujours été proches et bienveillants, même si on s’est fait mal de temps en temps. On s’est toujours bien entendu, on a toujours été réglos tous les deux (sourire).
Le grand qui vous rentre dedans à l’époque, il devait y avoir quelques pleurs non ?
TN: Des pleurs oui, d’énervement surtout. Comme il l’a dit, on s’est beaucoup fait mal. J’ai fini deux ou trois fois à l’hôpital quand même ! Ah ouais, ce n’était pas marrant (sourire) ! Il voulait avoir le dernier mot, mais moi aussi !
RN: C’était quand même sans faire exprès. Je m’en voulais beaucoup à chaque fois. Après, on ne s’est jamais engueulé ni fait la tête tous les deux. On s’est toujours bien entendu. Des petits accrochages, souvent, mais sans mauvaises intentions. Rien de très, très, très grave quand même.
Le diagnostic n’était pas trop sévère ?
RN: Quelques points de suture… (sourire)
TN: On s’y fait au bout d’un moment. (sourire)
Ça forge ?
TN: Ouais, c’est sûr, ça forge !
Quels sont vos souvenirs communs, sur les terrains ? Vous vous suiviez l’un et l’autre ?
TN: Oui moi je venais souvent le voir le week-end. Surtout quand il a commencé à jouer en cadets et juniors où ça jouait bien. Lui est aussi venu me voir quand il avait du temps. Mais par contre on n’avait jamais joué ensemble avant cette année.
RN: Effectivement, c’est le week-end, quand Théo venait me voir où quand j’allais le voir sur une journée. On n’a aucun souvenir en commun sur le terrain, car avec trois ans d’écart, on n’avait aucune catégorie qui se chevauchait. Lui n’avait pas l’occasion d’être surclassé avec moi car trois ans, c’était trop. Moi je ne pouvais pas jouer avec lui. Donc finalement, le seul moyen de jouer ensemble, c’était d’évoluer en équipe une au Stade Toulousain.
TN: Je me souviens qu’on a été à la Coupe du monde en Nouvelle-Zélande, en 2011. Là-bas on a fait du rugby en un-contre-un dans l’hôtel, dans les parcs. Donc c’est des bons souvenirs aussi. De toute façon on jouait tout le temps, même après les matchs ou les tournois. L’après-midi, ça se refaisait du rugby en un-contre-un. C’est ça nos souvenirs. Rugby…
C’est votre vie ?
RN: Oui, c’est notre vie. Ça a toujours été le cas depuis tout petit. On regardait les matchs tout le week-end, en rentrant de l’école on jouait, à l’école on jouait à l’UNSS… Notre vie s’est toujours articulé autour du rugby.
Chacun a eu son apprentissage où il y a eu des conseils, des échanges pour évoluer, notamment du grand frère ?
RN: Non, chacun a vécu son parcours. On avait papa (Emile, ancien international du Stade Toulousain, ndlr) qui était là pour nous aiguiller mais même lui ne nous donnait pas trop de conseils. Il nous laissait faire nos bêtises aussi pour qu’on apprenne nous-mêmes. Je n’ai pas trop le souvenir d’avoir donné des conseils à Théo. Il s’est forgé tout seul. Je pense m’être forgé tout seul aussi. Avec notre entourage qui nous a aidé mais sans nous donner des conseils. Tout le monde nous laissait faire comme on le voulait, comme on le sentait. En étant toujours bienveillant. Aujourd’hui, on s’est forgé avec nos parcours, nos différences, nos objectifs différents aussi. On est, grâce à ça aujourd’hui, en équipe première.
Romain est arrivé le premier en équipe une du Stade Toulousain. Théo, comment as-tu vécu ce moment ?
TN: J’étais content. Il a commencé à 18 ans, c’est super jeune. Moi, je ne me rendais pas trop compte, jusqu’à présent, que c’était vraiment un âge jeune pour jouer en pro. Non, vraiment content, un peu stressé pour son premier match, je me rappelle contre Agen. Moi, j’étais en stage avec mon équipe, j’avais regardé le match sur mon téléphone. J’étais stressé car en plus il était rentré tôt, sur une blessure. Mais après, il m’a vite rassuré. Je voulais qu’il fasse un bon match, qu’il montre qu’il était bon et qu’il avait sa place. Parce qu’à l’époque, Ntamack, lui ou moi on n’avait rien fait. Il n’y avait que notre père. Mais il a vite rassuré tout le monde, ça s’est enchaîné et maintenant, il est à 100 matchs avec le Stade.
Romain a été un exemple pour vous, une source d’inspiration ?
TN: Un exemple, je ne sais pas. Une source d’inspiration, oui. Ce qu’il a fait est incroyable. Je l’ai toujours regardé et je me suis toujours un peu inspiré de lui. Après, chacun a le parcours qu’il doit avoir.
Romain, son petit frère à l’entraînement en “une”, ça fait quoi ? On a un œil sur lui en particulier ?
RT: Bah au début ça fait bizarre ! Comme on l’a dit, on n’a jamais évolué ensemble. Donc à mon tour j’étais un peu stressé pour lui au début sur les premiers entraînements. Mais après, il m’a vite rassuré, j’ai vu qu’il était largement capable d’évoluer avec nous. J’étais très fier de m’entraîner avec lui. Il a les capacités de s’entraîner et d’enchaîner les matchs. Il est très à l’aise dans le jeu, en défense ou en attaque. L’inquiétude est vite passée au fait que je sois rassuré et que je sois tranquille sans me soucier de ce qu’il a à faire.
Vous avez disputé un premier match ensemble, face à Toulon et encore, Romain est sorti blessé avant que Théo ne rentre. Ensuite il y a eu les matchs à Lyon et La Rochelle. Etre ensemble dans ce vestiaire, avec ce maillot, c’est quelles sensations ?
TN: En fait, ça va tellement vite, qu’on n’a même pas le temps de se le dire. Mais on le sait tous les deux, moi je suis super content de jouer avec lui. Lui aussi, mais on est tellement concentrés que ça passe en second plan. Mais c’est après le match, on se dit : “put… c’est cool qu’on ait pu jouer ensemble” Je ne sais plus sur quel match, avant de rentrer sur le terrain j’étais au fond, à la fin de la queue, et il est venu me chercher et m’a fait comprendre qu’on devait rentrer ensemble. C’est cool, il me porte bien. Même si pour l’instant il n’y a pas eu trop de victoires dans nos matchs communs, c’est vrai que c’est plaisant de jouer avec son frère.
Romain est en équipe de France, il est présent médiatiquement. Etre déjà un “fils de” et maintenant un “frère de”, comment on le vit ?
TN: Avec tout ce qu’il a fait, je trouve ça normal qu’il soit autant médiatisé. Moi, ce n’est pas mon cas et tant mieux ! Parce que je ne suis pas trop dans ça… c’est le parcours qui fait qu’il en est là et on ne peut qu’être content pour lui.
Et vous Romain ? Il y a une certaine pudeur concernant ça ? Vous pouvez échanger là-dessus ?
RN: Non, on ne l’évoque pas, on n’y fait même pas attention. Je pense que l’on n’en a jamais parlé. La pression qu’il a, au-delà du nom, de jouer dans cette équipe, dans ce club avec ce maillot-là, il n’y a pas besoin d’en rajouter. Chacun fait son truc, moi de mon côté, Théo fera le sien, il aura son parcours, différent, avec les bonnes et les mauvaises aventures. Pas besoin de se mettre plus de pression que ça. Et puis il s’en sort très bien depuis qu’il joue en équipe une. Donc au final, ça montre que d’être “fils de” ou “frère de”, ça n’a que très peu d’importance.
Vous faites encore des un-contre-un ?
RN: Moi, j’évite… (sourire)
TN: Moi j’essaye surtout de le choper aux entraînements.
RN: Oui il “m’attrape” parfois aux entraînements.
TN: Bah, 3e ligne rugueux, c’est compliqué ! Je ne sais pas si c’est le fait que ce soit lui ou qu’il joue demi d’ouverture, mais j’aime bien monter fort. Donc c’est vrai que je le fais un peu ch… des fois. Même s’il s’en sort bien et qu’il me passe devant et qu’il n’est déjà plus là.
RN: Après, c’est le jeu à l’entraînement. Certes, on est frère, mais comme avec des amis. Ça fait partie du rugby. Donc quand je suis dans la zone j’essaye de l’éviter parce que je sais qu’il va monter fort. Mais ça me fait travailler, ça le fait travailler lui aussi et c’est très bien.
Il y a également le maillot bleu. Vous êtes tous les deux passés par les sélections de jeunes. Théo, l’ambition un jour, c’est la grande équipe de France ? Ce serait logique de viser cet objectif ?
TN: Oui bien sûr, mais chaque chose en son temps. Pour l’instant, j’essaye de jouer au maximum avec le Stade Toulousain. Et après, ce sont des choses qu’on ne choisit pas. Donc moi je n’y pense pas encore. Je préfère me concentrer sur moi, sur mon équipe. De jouer un maximum, de montrer de quoi je suis capable. A moi-même, aux entraîneurs. Et après, on verra ce qu’il se passe, mais je ne prends pas du tout la tête avec ça.
Romain, la Marseillaise, ce serait côte à côte ?
RN: Ce serait forcément dingue et incroyable. Mais comme il l’a dit, chaque chose en son temps. Il a encore plein de choses à faire, à travailler puis si un jour ça vient, ça viendra. Moi je vais travailler pour y rester aussi car le maillot n’appartient à personne. Donc le jour où il sera appelé, j’espère y être aussi. En tous cas on travaille tous les jours pour jouer en club mais forcément pour un jour porter le maillot de l’équipe de France. On n’est pas les seuls dans ce cas-là, on fait tout pour être les meilleurs possibles sur le terrain et si un jour ça doit sourire, ça sourira.
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