Comment avez-vous réagi quand vous avez vu l’équipe de France chanter votre chanson dans les vestiaires?
Ce qu’il faut comprendre c’est que, pour moi, ça a commencé en 2016 quand les joueurs de l’Irlande du Nord ont commencé à chanter cette chanson (à l’Euro en France, ndlr). Il y a eu beaucoup d’auditeurs. La chanson a été utilisée par Tyson Fury, le champion du monde de boxe ou encore au Staples Center de Los Angeles. Ça a été utilisé par de nombreuses équipes. Il y a aussi eu l’équipe de France de rugby ! Pour moi, ça a été quatre ou cinq ans où j’ai vu quelque chose d’encore plus grand que l’équipe de France, un hymne mondial du sport. C’est vraiment intéressant, parce que la musique et le sport sont très similaires pour moi, les deux rassemblent les gens. La musique et le sport rassemblent les personnes de différentes classes sociales, de différentes couleurs, différentes opinions. Ma chanson a vraiment été fabriquée pour faire ça. L’énergie qu’il y a derrière ma chanson est de rassembler les gens. Il y a plusieurs niveaux dans cette chanson et tout fait sens pour moi.
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Comment expliquez-vous que cette chanson touche et fédère les gens?
Il y a plusieurs niveaux différents, je pourrais en écrire un livre. Commençons par le degré d’interprétation personnel, quand et pourquoi cette chanson a été écrite. Quand je suis arrivé à New York en étant jeune, j’ai trouvé qu’il y a beaucoup d’extrêmes: une extrême pauvreté, une extrême richesse… Quand je suis arrivée à New-York depuis l’Italie, c’était évident. Ça me frappait vraiment. Donc il y avait une observation sociale que j’avais besoin de communiquer dans cette chanson. Dans le même temps, il y a aussi de mon vécu personnel. Quand j’étais enfant, on m’a interdit de danser, on m’a dit que je ne pouvais plus danser quand j’avais 13 ans. Pour moi, c’était vraiment un gros problème, c’était mon identité. J’étais séparée de ma nature. Ma nature est de bouger. Un docteur m’a dit que quand je devais m’asseoir le plus possible et que je ne pouvais plus danser parce que j’avais un gros problème de dos. Quelque chose est mort en moi. De manière assez drôle, j’ai écrit une chanson qui fait danser le monde entier ! Quand je suis allé à New York et que j’ai vu toutes ces différences entre les riches et les pauvres, au même moment, j’ai commencé à redécouvrir la danse et, petit à petit, à revenir à cette passion. J’ai vu un docteur américain qui m’a dit ‘Vous pouvez danser ! Vous avez juste à faire attention!’ Je me suis dit que j’avais gâché beaucoup de temps à ne pas pouvoir danser. J’ai été séparée de ce que j’aimais le plus au monde et je l’ai redécouvert. Je n’ai plus jamais passé un seul jour sans danser depuis ce moment. Je suis revenue à la danse et c’est comme si j’étais retombée amoureuse pour la première fois. Mon premier amour à New York était un homme qui venait du Sénégal et qui était un danseur. Il représentait la danse pour moi. La chanson dit ‘My love has got no money, he’s got his strong beliefs’ (‘Mon amour n’a pas d’argent, il a ses fortes convictions’), c’était moi! Quand vous tombez amoureux, c’est parfois juste une leçon. Et j’ai appris que, quand on enlève à un enfant ou un adulte une passion, on crée beaucoup de dommages. Je crois que beaucoup de problèmes dans le monde sont dus au fait que les gens ne sont pas passionnés par ce qu’ils font, c’est pour cela qu’ils sont en colère ou malheureux. Ce que veut dire Freed from desire, c’est que vous n’avez pas besoin d’une plus grosse voiture, vous n’avez pas besoin d’en avoir toujours plus. Le concept de Freed from desire est aussi le concept du ‘moins c’est plus’.
Croire en ses rêves est aussi le message derrière cette chanson?
Non ! Je ne crois pas que tout ce que je viens de dire peut juste tenir dans la phrase ‘croyez en vos rêves’ ! La vie et les choses sont complexes. Je dirais que les promesses qu’un enfant se fait à lui-même sont très importantes. Souvent, les enfants savent qui ils sont. Les promesses que les enfants se font à eux-mêmes sont très puissantes. Je voulais me reconnecter à ce que j’étais et voir le monde pour la première fois à New York en tant que jeune fille. Voir toutes ces disparités… Qu’est-ce qui importe dans la vie? Que dois-je choisir dans cette grosse ville? Dois-je choisir l’argent? Dois-je choisir le succès? Dois-je choisir l’âme? J’ai commencé la photographie, ce n’était pas ma passion. Je photographiais des danseurs ou des musiciens. Un jour, j’ai pris des photos de DJ et j’ai fait un échange. Je leur ai dit que je prenais des photos d’eux gratuitement en échange de pouvoir chanter sur leurs musiques. Je me suis inventée, je me suis faite toute seule.
La chanson est un hymne du féminisme et de la communauté LGBT. C’est symbolique que ça devienne un hymne pour une Coupe du monde qui se tient au Qatar…
C’est fantastique! La vie vous teste toujours. Tout revient à la surface. L’environnement, le droit des femmes… Les gens sont vraiment tendus ces dernières années comparé aux années précédentes. C’est intéressant car ma vie a été dédiée aux droits des femmes. Je suis la féministe N°1. C’était très dur d’être une femme dans ce monde et dans le monde de la musique. Voir tous ces hommes chanter la chanson est également magnifique car ça inclut tout le monde. Il y a des féministes qui chantent cette chanson, il y a des joueurs de foot… Ça rassemble tout le monde. Mais je ne suis pas politicienne, je ne peux pas changer le monde avec une seule chanson. Mais, ce qui est sûr, c’est que ma chanson rassemble les gens et ça délivre un beau message. Quand je vois ces hommes arabes (des supporters d’Arabie saoudite ont été filmés en dansant sur Freed from desire au Mondial, ndlr) qui dansent si gracieusement et de manière si féminine sur ma chanson…C’est un peu le concept de ma chanson ‘Let the boy cry’ (‘Laisse les hommes pleurer’). Je pense que, en France, les gens sont les plus intelligents pour comprendre le concept de zone grise. La vie est dans la zone grise, il y a plusieurs vérités.
Iriez-vous au Qatar pour la chanter?
Ce n’est pas en restant chez vous que vous pouvez changer les choses. Je n’ai pas été invitée, donc je ne vais pas y aller. Mais je pense que, si c’était le cas, j’irais pour changer les choses.
Etes-vous fière de voir que votre chanson, écrite en 1997, est aujourd’hui toujours un hymne pour une équipe de sport comme la France?
C’est un hymne pour beaucoup de choses. Pour la communauté LGBT, pour l’autonomisation des femmes, pour l’environnement… C’est une chanson à laquelle les gens connectent leur énergie. Hier, on m’a envoyé une vidéo d’un sport que je ne connais pas, c’est une sorte de tennis. Un homme qui est un joueur très connu a perdu le match et, quand il a perdu, tout le monde a chanté Freed from desire. Et c’est magnifique! C’est une chanson pour ceux qui gagnent, pour ceux qui perdent.
Les supporters de l’équipe d’Angleterre entonnent aussi votre chanson. Ce qui est drôle, c’est que le prochain match est France-Angleterre…
Oui, c’est bien! C’est de la musique. Je ne suis pas le coach d’une équipe de football. Je suis musicienne et ma musique est utilisée pour donner de l’énergie aux sportifs pour gagner mais c’est aussi une forme de résilience pour ceux qui perdent, pour recommencer comme moi j’ai pu le faire avec la danse après plusieurs opérations.
Voulez-vous chanter Freed from desire avec l’équipe de France?
J’adorerais! La France a toujours été un pays merveilleux avec moi. Je pense que les Français sont très sensibles. Cette sensibilité va bien avec moi. Les Français sont très engagés et c’est un bon public.
Avez-vous un message à envoyer à l’équipe de France?
Bonne chance! (En français) Et allez les Bleus!
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