À l'issue du comité directeur qui a vu la majorité rester en place et donc avoir un président par intérim désigné dans le clan Laporte, Florian Grill s'est exprimé. Pour lui, cette décision est contre démocratique, c'est la raison pour laquelle les membres de l'opposition Ovale Ensemble ont décidé de démissionner de ce comité directeur.
Tout d'abord, la démission de Bernard Laporte est-elle une victoire pour vous ?
La démission de Bernard Laporte n'était pas notre attente principale. Notre attente, c'était que le comité directeur prenne ses responsabilités. Il avait le choix entre deux solutions statutaires que la ministre a rappelé. La première solution étant l'article 21 consiste à dire que maintenant que Bernard Laporte a démissionné, on nomme un président par intérim et il exerce ses fonctions jusqu'à l'assemblée générale en juin puis une élection s'organise en juin. C'était une possibilité qui nous semblait assez peu saine. Une forme de hold-up même puisqu'on donne la parole aux clubs et on leur retire en leur imposant un président par intérim. La deuxième solution, celle que nous souhaitions, était celle de l'article 15. La possibilité pour le comité directeur de démissionner pour écouter la parole des clubs et se montrer responsable vis-à-vis du rugby français.
Ils ont choisi la première option et donc les élus "Ovale Ensemble" ont décidé de démissionner à l'unanimité et de suivre les prescriptions de la ministre. En ce qui nous concerne, on ne peut pas cautionner cette manière de faire, un espèce de diktat sur le rugby français.
Quelle est la suite maintenant ?
S'ils restent dans leur logique, celle du président par intérim nommé parmi les membres du bureau fédéral, ce président aura à gérer la fédération sans légitimité obtenue par les urnes. En juin, un membre du comité directeur, dont nous avons démissionné donc forcément un membre de leur équipe, pourra se présenter et devenir le nouveau président de la fédération sans en passer par les urnes, sans passer par un choix par les clubs. La ministre des Sports Amélie Oudéa-Castera a appelé à la responsabilité des membres du comité directeur mais ils ont décidé de s'accrocher. Je regrette que la parole des clubs ne soit pas entendue. Et je regrette que les bonnes décisions ne soient pas prises.
C'est un putsch selon vous ?
Ça y ressemble en tout cas. Je pensais que les élus du comité directeur étaient des bénévoles du rugby et qu'ils auraient le sens des responsabilités. C'est un enjeu majeur pour le rugby français, pour le pays. S'accrocher et refuser la décision des clubs n'est pas correct. En tout cas, c'est une position qu'Ovale Ensemble n'a pas voulu cautionner d'où notre démission. Ce comité directeur veut gérer la fédération par lui-même, indépendamment de la décision des clubs ? Et bien qu'il assume cette responsabilité. Il continuera jusqu'en 2024 sans légitimité alors qu'il y a des enjeux énormes comme la coupe du monde, la renégociation du stade de France ou encore les problématiques du rugby amateur, entre autres.
Quel impact a eu la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castera dans ce comité directeur ?
La ministre a fait une première intervention, ensuite lors d'un tour de table, chacun a pu exprimer sa vision. Serge Simon a expliqué qu'il y avait une voie statutaire pour un président par intérim qui lui convenait. J'ai moi-même expliqué que c'était assez grossier d'avoir fait parler les clubs pour ne pas les écouter. Mme Oudéa-Castera a expliqué que le grand public et même les clubs, personne ne comprendrait qu'ils s'accrochent de cette manière et que ce n'était pas la position saine. Pour autant, elle a précisé que le bilan n'était pas forcément mauvais et je le concède moi-même, je vote 80% des réformes donc il y a des choses qui sont positives et qui ont évolué positivement mais que personne ne comprendrai ce choix. Elle a donc dit qu'elle recommandait à la majorité de reproposer une candidature et un projet et que le meilleur gagne.
Certains autres membres se sont posé des questions sur le fait de démissionner ?
Non, je les ai sentis soudés. J'avoue que je suis très déçu de cette attitude pour le rugby français. C'est un manque de dignité, de respect. Je pense qu'avec Ovale Ensemble, nous avons la position qui est la bonne. On suit la position de la ministre et c'est ce qui s'impose.
Une cohabitation était inenvisageable ?
Ce n'est tout simplement pas la demande des clubs. Je pense qu'il faut respecter la démocratie lorsqu'elle s'exprime. Se cacher derrière une solution statutaire alors qu'il en existe plusieurs autres et notamment l'article 15 qui aurait prouvé l'écoute des clubs. Cette décision est un retour en arrière inadmissible. On nous impose un président que les clubs n'ont pas choisi. La position est inentendable. Notre décision de démissionner est la seule qui soit raisonnable au regard du résultat du vote.
Laporte aurait pu choisir quelqu'un d'Ovale Ensemble pour devenir président par intérim ?
Il ne pourrait pas le faire non puisqu'il faut que ce soit quelqu'un du bureau fédéral et que plus aucune personne d'Ovale Ensemble n'est membre du bureau fédéral. On peut imaginer que ce soit un des vice-présidents, secrétaires ou trésoriers qui occupe cette fonction. À l'Assemblée générale de Lille en juin, ce sera forcément quelqu'un de leur équipe qui pourra être élu. Donc en fait c'est un véritable hold-up sur le rugby français.
En 2024, il n'y aura donc plus d'opposition à la FFR ?
Effectivement. Nous voulons les mettre devant leurs responsabilités en disant : vous avez un choix très clair des clubs qui montre qu'ils ont voulu tourner la page et vous en décidez autrement avec un président illégitime à quelques mois de la coupe du monde. En somme on dit aux clubs, donnez votre avis mais ça sert à rien.
Désormais, combien de membres reste-t-il au comité directeur ?
Nous étions 38, il y en a 9 qui ont démissionné donc il en reste 29. Bernard Laporte a démissionné donc ils sont 28. On verra la position de la Ligue nationale de rugby qui a deux membres présents. S'ils venaient à démissionner, ils seraient donc 26. Il faudrait qu'il y ait 7 membres du comité directeur qui comprennent que leurs responsabilités sont engagées et que cette solution de putsch ne tient pas la route (NDLR : s'il ne reste que 19 membres, de nouvelles élections devront être faites).
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