Astérix et Obélix : les flops et le top de leurs aventures au cinéma
À l’occasion de la sortie d’Astérix et Obélix : l’Empire du Milieu, retour sur les quatre précédents films qui ont porté sur grand écran en prises de vue réelles, les aventures des deux Gaulois.
Véritables têtes d’affiche de la culture populaire hexagonale, les personnages Astérix et Obélix, créés par Goscinny (au scénario) et Uderzo (au dessin) continuent, plus de 60 ans après leur naissance en 1959, à déchaîner les passions. Témoins : les vagues de commentaires que suscite chacune de leurs nouvelles apparitions, en album ou sur grand écran.
Malgré des budgets colossaux et des castings à faire pâlir la Croisette, toutes les adaptations cinéma des héros gaulois semblent devoir tirer plus de grimaces que de fous rires. Toutes ? Non. Car l’une d’entre elles, menée par un irréductible metteur en scène a su trouver le ton juste… Alors que sort L’Empire du milieu, de Guillaume Canet, ce mercredi 1er février, retour sur trois flops et un top.
Mais d’abord, un peu d’histoire. Astérix et Obélix n’ont pas dix ans quand il est déjà question de leur donner une vie animée. Pierre Tchernia s’y colle en 1967, réalisant pour le petit écran Deux Romains en Gaule, une version en noir et blanc mêlant animation et prises de vues réelles dans laquelle le comédien Roger Carel, déjà interprète d’une version radiophonique un an auparavant, prête sa voix au petit héros moustachu – rôle qu’il conservera jusqu’au film d’animation Astérix : le domaine des dieux (2014, d’Alexandre Astier et Louis Clichy).
Des films d’animation, il y en aura une dizaine. Mais, forcément, entre le succès mondial des albums (380 millions vendus en 2020) et la popularité tous azimuts de l’univers de Goscinny-Uderzo, le cinéma ne tarde pas à lorgner vers les deux Gaulois.
Dans les années 1960, Claude Lelouch envisage ainsi une adaptation avec des comédiens non professionnels sélectionnés pour leur ressemblance physique avec les personnages du village gaulois. Le projet cale en cours de production. Louis de Funès se voit jouer un Astérix sans moustache auquel pourrait se joindre Lino Ventura dans le rôle d’Obélix. Mais « las, las, las », selon le mot d’un chef romain dans La Serpe d’or (1960), rien de tel ne se fera.
Il faudra attendre 1999 pour que Claude Zidi réalise Astérix et Obélix contre César. Christian Clavier y joue le rôle du petit moustachu – très donneur de leçons, en l’occurrence ; Gérard Depardieu y interprète son acolyte. Également à l’affiche, une pléiade de comédiennes et comédiens chers au cinéma populaire : Michel Galabru, Claude Piéplu, Arielle Dombasle, et même Roberto Benigni en Tulius Detritus (La Zizanie). Et une adaptation très littérale qui ne parvient pas à sortir des cases de l’univers de Goscinny-Uderzo, et n’en rend qu’une pâle copie.
Effets spéciaux inutiles, décors cheap… Le film de Zidi remporte pourtant un franc succès avec 9 millions de tickets vendus, soit le plus gros succès hexagonal pour 1999 – notamment face à Star Wars : la menace fantôme, de George Lucas. Au total, l’adaptation comptera 24 millions d’entrées au niveau mondial.
Aux Jeux Olympiques (Frédéric Forestier et Thomas Langmann, 2008) et Au service de Sa Majesté (Laurent Tirard, 2012) déclinent les ingrédients du film de Zidi pour un résultat très mauvais pour le premier, et vraiment pas terrible pour le second.
Malgré un budget de 78 millions d’euros pour la version « olympique » des Gaulois (l’un des plus gros budgets du cinéma français), Clovis Cornillac et Gérard Depardieu peinent à convaincre devant la caméra de Forestier et Langmann. Et ni la présence de Zinédine Zidane ni l’incarnation de César par Alain Delon (pas mauvais pour autant) ne sont en mesure de contrebalancer un scénario et des gags faibles – comme si on avait vidé l’univers de Goscinny et Uderzo de sa substance à la fois légère et maline. Quelque 16,5 millions de spectateurs dans le monde ont pu mesurer la médiocrité de cette adaptation.
Quant à l’opus Au service de Sa Majesté, tourné en 3D (très tendance à l’époque), ni Édouard Baer en Astérix, ni Fabrice Luchini (en Fabrice Luchini – pardon, en César) ne parviennent à nous tirer davantage qu’un bout de sourire. Les costumes semblent tout droit sortis d’une friperie et Catherine Deneuve en queen aurait mérité mieux que des robes qui vous arrachent une grimace, entre pitié et dégoût. Le public s’est moins laissé berner : seuls 8 millions d’entrées dans le monde pour le film de Laurent Tirard.
Il faut voir Mission Cléopâtre pour comprendre ce qui ne fonctionne pas dans les épisodes Aux Jeux Olympiques et Au service de Sa Majesté. Réalisé par Alain Chabat en 2002 sur l’impulsion du producteur Claude Berri, l’adaptation a des airs de « bonne traduction » : plutôt que d’essayer de coller à tout prix à la bande-dessinée, l’ex-Les Nuls s’approprie l’univers gaulois, créant un mélange à l’équilibre subtil entre éléments incontournables, choix « dans l’esprit de », et créations assumées.
On y voit ainsi d’Astérix et Obélix reprenant un refrain de Claude François (Alexandrie, Alexandra), ou encore Depardieu/Obélix se lançant, à la suite de la chute du nez du Sphinx, dans la tirade du nez en écho à son rôle dans l’adaptation cinématographique de Cyrano de Bergerac (1990, Jean-Paul Rappeneau).
Chabat connaît l’univers d’Astérix, il s’en empare sans craindre de faire des pas de côté, d’y amener sa propre lecture pétrie d’insolence et de parodie développée avec Les Nuls – finalement pas si loin de celle de Goscinny. Autre point essentiel qui fait défaut aux trois autres adaptations : Chabat réussit à amuser petits et grands. Humour visuel, jokes référencées… Le spectateur, quel que soit son âge, y trouve son compte – ce qui est probablement un élément-clé du succès des albums de Goscinny-Uderzo.
Applaudie par la critique, l’adaptation d’Alain Chabat a été vue par 14 millions de spectateurs. La bonne nouvelle, c’est que c’est le même Chabat qui chapeaute la série d’animation mettant en scène les Gaulois, à voir prochainement sur Netflix.